Avis de non-participation au Grand Barouf Numérique

Adressé à Damien Castelain, président la Métropole Européenne de Lille (MEL)

Comme son nom l’indique, votre Grand Barouf Numérique ne sert qu’à faire du bruit, pas à débattre. C’est avant qu’il aurait fallu nous consulter, si toutefois les débats participatifs servaient à quoi que ce soit en matière de développement numérique et de Smart City. Entre vous et nous, il n’y a pas de « dialogue de sourds », comme vous le prétendez. Non seulement nous ne souhaitons pas dialoguer avec vous. Mais en plus nous vous avons très bien entendu, malgré le tapage que vous organisez aujourd’hui – au fait, doit-on appeler la police ?

Hier, l’ancienne mandature équipait les clients de Transpole d’une carte Pass-Pass RFID (28M €) pour ficher leurs déplacements, savoir qui se trouve et quand sur la métropole. Sans débat bien sûr.

Chaque année, les subventions pleuvent sur Euratechnologies (1M € par an de la MEL), les projets de Smart Home et Smart City du CITC-EuraRFID, ceux de La Plaine Images ou de Blanchemaille pour le e-commerce. A-t-on eu à se prononcer ? Vos opérations d’OpenData n’y feront rien : quand il s’agit de développement économique, et on le sait depuis maintenant trois révolutions industrielles, la décision ne tient qu’à vous et vos « partenaires » de la Chambre de Commerce, ici co-organisateurs de l’événement.

Au fait, votre Centre opérationnel de commandement ouvert au bénéfice de l’Euro de foutbol se porte-t-il bien ? Les 37 écrans bunkérisés dans les sous-sols de la MEL et les 1 800 caméras de surveillance reliées, grâce à la fibre optique installée récemment, à la police et la Gendarmerie, ça va ? Pas de bugs ni de piratages ? Pas besoin des services de cybersécurité ouverts notamment par vos soins à Euratek ?

Et les 200 000 personnes concernées par le projet « You & Grid » que vous portez, là encore, avec la Chambre de Commerce pour installer des compteurs Linky (et des bornes de recharge de voitures à uranium), ont-elles participé à l’écriture de cet appel à projets. Pourtant ne prévoit-il pas de « connaître leurs habitudes », comme l’admet le directeur d’ENEDIS ? (VDN, 24/03/2016) Ils doivent savoir qu’en avril 2017, vous taperez au portefeuille de l’Europe dans le cadre des « Smart Cities and Communities » car il en va de leur liberté. D’ici 2020 le million d’habitants de la MEL devra installer un compteur électrique Linky qui espionnera les recoins de sa vie privée : a-t-il eu à donner son avis ? Non, et il n’aura pas même le droit de refuser le mouchard électronique.

Votre stratégie pour une MEL « Résolument digitale » (juin 2016), vous l’avez écrite tout seul. Et aujourd’hui, vous organisez ce Barouf pour nous présenter avec fracas votre grand projet « La MEL – territoire des numériques ». Les métropolitains que vous gouvernez savent-ils que vous allez financer l’installation d’une carte d’identité électronique unique (à partir de la carte Pass-Pass) pour leurs démarches quotidiennes : déchetteries, salles de sports et culturelles, transports, cantines et garderies ?

C’est donc ça votre « territoire numérique », votre Smart City : le contrôle de nos activité publiques par une carte de vie quotidienne, et celui de notre vie privée par Linky. Le tout sans notre assentiment.

Étant donnés les marchés et les « opportunités » financières que le numérique ouvre à l’industrie régionale, on voit mal comment on pourrait discuter quoi que ce soit, pas même à la marge. Comme vous le dites, l’enjeu de votre métropole « résolument digitale » doit créer un « différentiel d’attractivité ». Ce qu’elle ne fera pas tant les métropoles du monde entier, de Doha à San Francisco, courent le même lièvre dans un mimétisme confondant. L’humain que vous prétendez convoquer au centre du développement numérique n’est bon qu’à se traîner une fois l’an dans des « débats mouvants » sans conséquences, comme ceux du Grand Barouf. Le reste de l’année, il fait quoi ? Vous nous demandez d’imaginer notre emploi de demain, mais on le connaît déjà : c’est chômeur, éventuellement avec un revenu universel pour croupir devant un écran. Même les patrons réunis à Davos l’avouent – et s’en félicitent : le numérique leur fera économiser sept millions d’emplois d’ici 2020 dans les pays industrialisés.

Sur la métropole lilloise, ainsi qu’on vient de le voir, comme ailleurs dans les pays riches, l’humain est déjà dépassé, évincé du travail et des décisions qui le concernent au quotidien, il est obsolète. Et cette obsolescence est programmée par des gens comme vous sans qu’on ait eu à dire quoi que ce soit.

Votre Barouf n’est pas une invitation à débattre,

c’est une opération d’auto-promotion

Participer à ce barouf reviendrait, pour nous, à valider notre obsolescence. Comme on n’est pas masos, on vous laisse à vos mondanités et vos auto-congratulations. Nous avons déjà notre avis : votre « territoire numérique », c’est non. Il n’est, et ne sera, que contrôle, surveillance, abêtissement et chômage. Alors amusez-vous bien. On espère que le DJ sera à la hauteur des verrines et de vos ambitions.

Hors-sol et le Comité anti-Linky de Lille