Les Chimpanzés du futur

Certains perturbent un colloque, pendant que d’autres écrivent un manifeste.

Les chimpanzés du futur bordelais perturbent le colloque « Le devenir cyborg du monde »

Lundi 20 novembre, quelques Chimpanzés bordelais ont interrompu le colloque de promotion du transhumanisme organisé par l’université et la librairie Mollat.

Ils ont laissé quelques peaux de bananes et ce tract :

http://www.piecesetmaindoeuvre.com/IMG/pdf/devenircyborga4.pdf

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Le manifeste des chimpanzés du futur 

Un livre paru en 2017 aux éditions service compris

Il est le fruit de la réflexion critique du groupe Grenoblois « Pièces et Main d’œuvre » en réaction à la fameuse pensée prophétique sur le futur du genre Homo d’un SUPER-chercheur (Kevin Warwick) en cybernétique : « Il y aura des gens implantés, hybridés, et ceux-ci domineront le monde. Les autres qui ne le seront pas, ne seront pas plus utiles que nos vaches actuelles au pré. » Et encore, « ceux qui décideront de rester humains et refuseront de s’améliorer auront un sérieux handicap. Ils constitueront une sous-espèce et formeront les chimpanzés du futur. »

Des humains, futurs sous-robots ?

Que vivent donc les chimpanzés du futur !

Pour connaitre le sommaire du livre :

Les chimpanzés du futur_sommaire

Pour lire le document en entier de PMO annonçant le livre (avec son histoire avec les éditions du Seuil) :

http://www.piecesetmaindoeuvre.com/spip.php?page=resume&id_article=960

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Appel des Chimpanzés du futur

https://chimpanzesdufutur.wordpress.com/

Frères humains, sœurs humaines,

Vous avez entendu parler du transhumanisme et des transhumanistes ; d’une mystérieuse menace, groupe fanatique, société de savants et d’industriels, discrète et puissante, dont les menées occultes et l’objectif affiché consistent à liquider l’espèce humaine pour lui substituer l’espèce supérieure, « augmentée », des hommes-machines. Une espèce résultant de l’eugénisme et de la convergence des nanotechnologies, des biotechnologies, des neurotechnologies et des immenses progrès de la science.

Vous avez entendu l’ultimatum, cynique et provocant, de ce chercheur en cybernétique : « Il y aura des gens implantés, hybridés, et ceux-ci domineront le monde. Les autres qui ne le seront pas, ne seront pas plus utiles que nos vaches actuelles gardées au pré. » Et encore, « Ceux qui décideront de rester humains et refuseront de s’améliorer auront un sérieux handicap. Ils constitueront une sous-espèce et formeront les chimpanzés du futur. »

Et vous vous êtes demandé s’il fallait prendre ces esbroufes au sérieux, ou s’il ne s’agissait que de science-fiction et de l’expression boursouflée de l’orgueil technocratique.

Hélas, le danger est véritable, et l’Humanité affronte une tentative d’extinction, fomentée par et pour une faction égoïste, implacable et toute-puissante, lasse de partager ce monde résiduel avec des masses de bouches inutiles et toujours plus nombreuses.

Comment en sommes-nous venus là, et que devons-nous faire ?

Au début, il y avait les poètes.

Rimbaud : « J’ai créé toutes les fêtes, tous les triomphes, tous les drames. J’ai essayé d’inventer de nouvelles fleurs, de nouveaux astres, de nouvelles chairs, de nouvelles langues. J’ai cru acquérir des pouvoirs surnaturels. Eh bien ! Je dois enterrer mon imagination et mes souvenirs ! Une belle gloire d’artiste et de conteur emportée ! »

Ducasse : « C’est un homme ou une pierre ou un arbre qui va commencer le quatrième chant. »

Puis les artistes futuristes, Français, Italiens, Soviétiques ; Marinetti, Maïakovski, Apollinaire et tant d’autres, chantres de la violence et de la vitesse ; clairons et rescapés de la Grande Guerre industrielle et mondiale, exaltèrent dans la technologie le vrai moyen de « changer la vie » et de « transformer le monde ». Ils firent la guerre aux vieilleries poétiques, au soleil et à la lune ; ils glorifièrent les aéronefs, les barrages, les moteurs, l’électricité, les Titanic, les Métropolis, les armées blindées, les stades gigantesques. Et les robots, les masses mécanisées.

Ils propagèrent les deux grands mouvements de l’époque : la technologie et le totalitarisme. Deux mouvements convergents. Deux aspects d’un même mouvement d’ingénieurs des hommes et des âmes, visant la fabrique de l’homme nouveau, de l’Übermensch nazi à l’Homme d’acier communiste en passant par toutes les variétés de surhommes et de Supermen, pour aboutir au cyborg ; à l’homme bionique des laboratoires transhumanistes, « hybridé » d’implants et d’interfaces.

Dès les années Trente, le national-révolutionnaire Ernst Jünger, critiquait le racisme biologique et grossier des nationaux-socialistes, pour lui opposer l’avènement d’un nouveau type d’humanité : Le Travailleur – en tchèque, le robot.

Ces progressistes au plan technologique sont des régressistes au plan social et humain, des partisans de la pire régression sociale et humaine ; ce qu’en langage commun on nomme des réactionnaires. Le nazisme, le fascisme et le communisme n’ont succombé que face au surcroît de puissance technoscientifique des Etats-Unis. Mais l’essence du mouvement, la volonté de puissance technoscientifique, s’est réincarnée et amplifiée à travers de nouvelles enveloppes politiques. Le laboratoire est florissant d’où s’est enfuie la créature immonde. Dès 1945, Norbert Wiener mettait au point la cybernétique, la « machine à gouverner » et « l’usine automatisée », qu’IBM implante aujourd’hui sous le nom de « planète intelligente ». C’est-à-dire la fourmilière technologique ubiquitaire, avec ses rouages et ses connexions, ses insectes sociaux-mécaniques qui se nommaient eux-mêmes, jadis, des zoon politikon, des animaux politiques.

Pour les transhumanistes et les collabos de la machine, l’humain est l’erreur. L’humain est faible et faillible, l’humain est fini. L’humain leur fait honte. Ils aspirent à la perfection, au fonctionnement infaillible et à l’infinité du système technologique ; à se fondre dans cette totalité autonome.

Les transhumanistes trouvent des soutiens partout. Ils s’expriment dans les émissions de radio et dans les journaux de référence. « L’homme augmenté, c’est déjà demain », proclame l’hebdomadaire citoyen qui se réjouit du fait accompli. « Un autre transhumanisme est possible », déclare l’Association française transhumaniste. On n’arrête pas le progrès et la gauche est pour le progrès. Etre de gauche, c’est réclamer le droit et les moyens de l’hybridation homme-machine pour toussétoutes ; d’un service public de l’eugénisme, nouvelle branche de la sécurité sociale.

Cependant, nous les chimpanzés du futur, nous n’avons pas perdu, et la machine n’a pas gagné.
L’Humain reste une bataille en cours tant qu’il ne s’abandonne pas, et il ne s’abandonne pas tant qu’il pense les choses et les dit avec des mots. Nommer une chose, c’est former une idée, et les idées ont des conséquences inévitables. Nous devons garder les mots et nommer les choses du mot juste. Nous devons former des idées avec leurs conséquences inévitables.

Les transhumanistes n’ont qu’une idée : la technologie.
Nous, chimpanzés du futur, n’avons qu’une technologie : les idées.
Cependant les idées sont plus actives, plus rapides, plus performantes que n’importe quelle technologie ; plus véloces et puissantes qu’Internet et l’électricité.

Nous disons : le transhumanisme est un nazisme en milieu scientifique. C’est ce techno-totalitarisme, ce « fascisme » de notre temps que nous combattons, nous, animaux politiques : Et nous vous appelons à l’aide.

Sauvons les mots.

Brisons les machines.

Reproduisez et répandez l’Appel des Chimpanzés du futur.

Grenoble, le 5 novembre 2014

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Du progrès de l’inhumanité

http://www.piecesetmaindoeuvre.com/IMG/pdf/Transhumanisme_inhumanite_-2.pdf

Extrait

Le transhumanisme, c’est la croissance

Si le transhumanisme progresse sans encombre, c’est qu’il est l’idéologie de l’accélération technologique et du progrès -qu’on-n’arrête-pas. Autrement dit, développer les NBIC, nanotechnologies, biotechnologies, informatique et neurotechnologies (et la convergence entre elles, qui multiplie leur puissance), c’est faire place, de fait, au post humain. Les technologies convergentes fournissent à celui-ci les outils de sa fabrication : implants neuro-électroniques pour réguler l’appétit, le comportement, les addictions, stimuler l’attention et la cognition ; modification des souvenirs par optogénétique ; puces RFID sous-cutanées ; prothèses de membres commandées par le cerveau ; implants cochléaires et rétines artificielles ; exosquelettes ; interfaces neuronales ; séquençage ADN ; sélection génétique des embryons ; ingénierie tissulaire et organique ; dispositifs de réalité augmentée ; objets connectés «intelligents», big data ;  intelligence artificielle, etc. C’est ce qu’annonçait dès 2002 un rapport pour la National science foundation (l’organisme qui pilote la recherche américaine) et le Département du commerce, préconisant «l’amélioration des performances humaines par les technologies convergentes».

Ce rapport officiel était co-écrit par un sociologue transhumaniste, William S. Bainbridge.

A l’ère du capitalisme technologique, ces technologies fournissent l’innovation seule à même de générer la croissance après laquelle courent les pouvoirs économiques et politiques. Le marché des neurodispositifs est ainsi estimé à 11,61 milliards en 2021.

A Grenoble comme ailleurs, c’est au nom de ces impératifs que les élus obéissent aux volontés des directeurs de laboratoires, industriels et responsables de pôles de compétitivité. Nos impôts financent la fabrique de l’homme-machine au Commissariat à l’énergie atomique (sciences du «Vivant », électronique, nanotechnologies), à Minatec (nanotechnologies), Clinatec (neurotechnologies), parmi d’autres.

Ce ne sont donc pas les décideurs hantés par la croissance du PIB qui s’opposeront à l’avènement d’un prétendu «homme augmenté ». Au contraire se soucient-ils de nous conditionner à notre futur inéluctable, à l’image de Corinne Narassiguin, porte-parole du parti socialiste : «Les socialistes doivent réfléchir et débattre de cette nouvelle étape de l’évolution humaine pour redéfinir ce qu’est l’humanisme au 21e siècle. Ne nous leurrons pas, si une avancée technologique est possible, quelqu’un la mettra en œuvre, que nos sociétés y soient prêtes ou pas.

(…)

Quand on constate notre incapacité à organiser un débat intelligible et apaisé sur la GPA, pratique issue d’une technologie médicale vieille de plusieurs décennies, on peut s’inquiéter de notre capacité à préparer la société française aux débats éthiques nécessaires sur ces nouvelles technologies de l’humain.»

Nous autres, humanistes «non-redéfinis», n’avons pas besoin d’être «préparés» aux débats sur ces technologies, nous l’avons initié depuis quinze ans, en refusant la reddition au «Progrès » technologique, synonyme de regrès social et humain.

De la Silicon Valley au Dauphiné

Le lieu emblématique de la nouvelle économie, la Silicon Valley, est l’incubateur du transhumanisme.

Google, Facebook, Amazon, comptent parmi leurs dirigeants des transhumanistes assumés. Ceux-ci impulsent et financent des programmes visant «la mort de la mort»… Les transhumanistes de la Silicon Valley ont créé un prix, le «Breakthrough Prize» pour récompenser des chercheurs qui font avancer leur projet. En novembre 2014, ils ont remis le «Breakthrough Prize in Life Sciences 2015», doté de 3 millions de dollars, au neurochirurgien grenoblois Alim-Louis Benabid.

Ce dernier est connu pour avoir réussi à calmer les tremblements de parkinsoniens à l’aide d’électrodes implantées dans le crâne. Plutôt que de lutter contre l’empoisonnement aux pesticides, cause de l’explosion des cas de Parkinson, il a créé en 2009 Clinatec, une «clinique expérimentale du cerveau», avec le Commissariat à l’énergie atomique de Grenoble, pour appliquer la convergence NBIC au cerveau. Clinatec développe deux programmes qui intéressent les transhumanistes : l’exosquelette pilotable par la pensée, et les nano-implants neuro-électroniques. Le premier peut «faire marcher» un paralysé et rendre super-fort un valide, les seconds sont destinés à traiter l’anorexie et la boulimie, les TOC et la dépression, et bientôt les addictions. C’est-à-dire à modifier des comportements et des troubles psychiques par le contrôle électronique du cerveau. Comme l’a reconnu le professeur Benabid : «Avec les électrodes et les implants cérébraux, on peut changer la personnalité de quelqu’un qui était anormal, pour le remettre dans la normalité. On peut faire passer les gens d’un état suicidaire à un état jovial…»

Clinatec fournit au transhumanisme les moyens concrets, matériels, de ses objectifs. C’est pourquoi A.L Benabid est récompensé par les chefs de file du mouvement. Comme lui, de nombreux chercheurs français œuvrent aux visées transhumanistes. Laurent Alexandre, urologue affairiste qui tient chronique dans Le Monde, a créé une société de séquençage génétique. Il ne perd pas une occasion de rappeler que des hommes qui vivront 200 ans ou plus sont déjà nés.

Miroslav Radman, spécialisé dans la lutte contre le vieillissement à l’Inserm et membre de l’Académie des sciences, participe aux colloques des adeptes du post humain. Selon lui, «il va bien falloir se poser la question de l’homme transgénique».

Son collègue, le généticien Daniel Cohen écrivait dès 1993 : «Je crois en la possibilité d’une nouvelle évolution biologique humaine consciente et provoquée, car je vois mal l’homo sapiens (…) attendre patiemment et modestement l’émergence d’une nouvelle espèce humaine par les voies anachroniques de la sélection naturelle.»

Du point de vue idéologique, l’Association française des transhumanistes, ou Technoprog, représente le mouvement dans l’Hexagone. Elle a organisé en novembre 2014 le premier colloque transhumaniste international en France, accueilli par l’Espace des sciences Pierre-Gilles de Gennes de l’Ecole supérieure de physique et de chimie industrielles de Paris (présidée par une élue municipale). Un précieux gage de respectabilité, dont elle peut remercier la Ville de Paris et le milieu académique.

Un corps sur mesure

Dans les laboratoires, les chercheurs se retranchent derrière l’argument de la santé. Ils appliquent le principe énoncé aussi bien par l’ex-ministre de la Recherche –grenobloise- Geneviève Fioraso que par le transhumaniste californien Aubrey de Grey. «La santé, c’est incontestable. Lorsque vous avez des oppositions à certaines technologies et que vous faites témoigner des associations de malades, tout le monde adhère», assure la première. Et le second, qui travaille sur l’abolition du vieillissement : «Mieux vaut ne pas parler de transhumanisme et provoquer des débats inutiles : je préfère dire que je ne fais que poursuivre la recherche médicale comme on l’a toujours fait».

Ces mensonges cyniques ne trompent pas même le Conseil de l’Europe, qui a publié en mai 2015 un rapport sur la convergence NBIC intitulé «De la pratique médicale à la vie quotidienne», qui explique : «Les connaissances et les technologies liées aux neurosciences sont de plus en plus utilisées dans des domaines et des pratiques non médicaux. Les neurodispositifs suscitent l’intérêt du secteur des loisirs (notamment les jeux) et d’individus qui cherchent à améliorer leurs performances ou leur bien-être mental pour des raisons personnelles (réduire leur anxiété en période d’examens) ou professionnelles (surveiller la surcharge cognitive). Toutes ces pratiques émergentes témoignent de l’utilisation d’une technologie médicale ou fonctionnellement équivalente par des personnes en bonne santé, à des fins non médicales.»

Et si les jambes bioniques nous permettent de courir plus vite sans fatigue, ou de gagner 10 cm, pourquoi ne pas remplacer nos membres par des modèles sur-mesure ? Enfin un corps choisi selon notre volonté, et nous offrant des avantages compétitifs sur le marché de l’emploi, de l’amour, du pouvoir.

Contre l’anthropocide

Ce corps sur-mesure dont rêvent les transhumanistes est un artefact. Une créature artificielle, dont les fonctionnalités sont le produit de la technologie, de ceux qui la conçoivent et la vendent.

L’homme-machine est l’objet de ses concepteurs -fabricants, un objet extérieur à lui-même. La prétendue autonomie de cette créature est celle de la batterie de téléphone : elle dépend en fait de contingences matérielles, qui remplacent les contingences naturelles pour les humains.

Les transhumanistes, en substituant leur volonté toute-puissante à cette absence de volonté, créent une inégalité. Surtout, ils détruisent la possibilité de former encore une espèce commune. Si chacun construit son identité et le support matériel de celle-ci selon ses propres choix, il n’y a plus de reconnaissance possible en l’autre. Fin de l’homme, fin de la société, fin de l’aventure commune.

C’est un anthropocide que préparent ces ennemis de l’humain, sous le regard complaisant, sinon complice, d’intellectuels, de journalistes, de chercheurs en sciences sociales en mal de scandale et de transgression.