La vertu par l’exemple

De la jet set au jet ski

La main sur le cœur et l’autre tendu vers les bulletins de vote vers lesquels il ne cesse de lorgner, il nous l’a promis, l’a juré : « J’ai eu une révélation. La lumière m’est apparue, l’écologie est la seule voie possible ! » Naïvement, nombre d’entre vous ont cru les élucubrations du petit banquier. Il est si sympathique avec son sourire carnassier et sa manière unique de se fiche de la gueule des humbles qu’il n’y avait aucune raison de douter de sa parole.

Bon, il convient cependant d’apporter quelques nuances, dues il est vrai à la lourdeur de sa charge carbone. La fonction crée des besoins qui exigent de ne jamais lésiner sur l’usage du jet privé ou des immenses convois automobiles pour accompagner ses déplacements. L’homme fait couler autant de carburants que de paroles, c’est vous dire qu’il ne connaîtra jamais le coût de la pompe, tout marcheur qu’il se prétendre être.

Autre obligation relative à sa charge, il doit demeurer en prise électrique dans sa modeste résidence, laissant les lustres brûler pour nous laisser croire qu’il mène la vie de Château à l’instar des monarques d’antan à Versailles. Il est redevable des dépenses publiques, il ne va tout de même pas créer un emploi, qui crèverait le budget de la nation, pour employer un souffleur de bougies électriques.

Les affaires sont les affaires. Il n’est pas question de se plier devant le principe de réalité quand il s’agit de faire tourner à plein régime une industrie à bout de souffle. Le « tout électrique » sera le nouvel Eldorado de son mandat. La voiture, le vélo, la trottinette, j’en passe et des plus extravagants encore pour des mobilités qu’on prétend abusivement douces. Qu’importe si les métaux lourds pèsent sur la conscience de ceux qui en ont encore, lui et ses sbires ignorent tout de ce mot qui n’est pas coté en bourse.

Le nucléaire sera notre avenir, le but ultime à moins qu’il ne soit l’échéance fatidique. Il est même question d’appuyer sur le champignon (métaphore douteuse il est vrai) pour accélérer la création de nouveaux EPR dont les premiers modèles sont une fulgurante réussite qui un jour nous sautera aux yeux. Oublions en cours de route les déchets pour les cent mille prochaines années et la pénurie d’eau au tournant du prochain été. Un homme qui n’a pas d’enfant, ne se soucie guère de sa descendance.

Entre lui et les citoyens, le courant passe, c’est une certitude. Jamais personnage d’état n’aura été autant adulé, admiré, respecté que celui qui jamais ne nous paiera en retour d’un peu de respect. Il méprise à tout va et se permet de s’offrir des vacances à nos frais dans son fort intérieur, à Brégançon sans oublier les petits séjours à La Lanterne, le reste de l’année.

C’est sur les rives de la Méditerranée qu’il nous démontre de manière aussi spectaculaire que pétaradante qu’il se moque comme de sa première chemise, des efforts d’économie énergétique qu’il demande à ces salauds de pauvres. Lui, il chevauche pour son seul plaisir, pour les sensations que la vie politique semble ne plus lui offrir, la griserie du jet-ski, le symbole absolu de la folie de cette société.

Cet engin bruyant, polluant, inutile et dangereux n’a d’autre ambition que de fournir en émotions ceux qui ne pensent qu’à eux. Notre chef suprême exalte là les vertus de l’individualisme à outrance, de la vacuité de notre civilisation des loisirs, de la gabegie énergétique de la plus spectaculaire des manières. Il a pris son virage écologique en tournant à fond la poignée d’accélérateur. Il surfe sur les flots en noyant le poisson. Il démontre que tout ce qu’il nous dit n’est que poudre aux yeux. La Planète, il s’en tape le coquillard, bien calé sur son terrible engin.

À contre-exemple.

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