Les annonces du Gouvernement aux agriculteurs

Tout d’abord, la parole à la Conf … en deux articles !

Un communiqué de la confédération paysanne du Nord/Pas-de-Calais

Suite aux annonces du gouvernement le 1er février 2024, la Confédération paysanne reste mobilisée et continue de mener des actions de blocage ciblées. Car les réponses données sont loin de répondre aux problématiques paysannes majeures. Fidèles au projet d’Agriculture Paysanne, nous continuons de demander une plus juste répartition économique pour des revenus dignes, et un soutien à la transition agro-écologique qui s’avère nécessaire pour sauvegarder les productions et l’environnement de demain.

A la veille du Salon de l’Agriculture 2024, la Conf’ du Nord-Pas de Calais vous invite à visiter des fermes paysannes, et à discuter des enjeux de revenu agricole, de lutte contre les accords de libre-échange, et de Souveraineté alimentaire. Les rendez-vous sont donnés :

Samedi 17 février, en fin de matinée, sur la ferme de Jean Claude Maréchal à Bermerain (59) – en grandes cultures Bio – depuis 40 ans !

  • Accueil à partir de 10h45, rue de la folie, 59213 Bermerain (parking possible dans la cour de ferme, 76A rue du Tordoir). 
  • Visite de ferme vers 11h, suivi d’un temps d’échange entre paysans et élus.
  • Petit encas paysan pour clore l’événement !

Dimanche 25 février, sur la journée, au Marais Sage, ferme d’Estelle, Martin et Sophie France à Campigneulles-les-Grandes (62) – jeunes installé.e.s en maraichage Bio.

  • Ferme ouverte de 10h à 15h30, au 39 grand rue, 62170 Campigneulles-les-grandes
  • 2 visites de ferme : à 10h30 et à 14h.
  • Auberge espagnole et soupe populaire le midi !
  • Stands associatifs et vente de produits locaux toute la journée.

Nous vous attendons au vrai salon de l’agriculture (celle du terrain, pas celle des vitrines) : apéro et causerie, une autre forme de mobilisation pour se souder et voir comment transformer la colère !

Pour le Comité de la Confédération paysanne Nord-Pas de Calais

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Lactalis : la Confédération paysanne combat sans relâche les prédateurs de la valeur du revenu paysan

Le travail de la Confédération paysanne pour défendre un revenu digne pour tous les paysans et paysannes est un combat de longue haleine. L’annonce hier des perquisitions menées au sein du groupe Lactalis intervient après que la Confédération paysanne ait transmis en janvier 2019 au Parquet National Financier un signalement étayé concernant des soupçons d’évasion fiscale.

Notre objectif est de faire cesser les pratiques de prédation de la valeur par Lactalis. Précédemment, la Confédération paysanne avait aussi déposé des plaintes pour extorsion de la valeur dans plusieurs départements laitiers. Nous avions aussi obtenu la publication des comptes de Lactalis.

Les pratiques du numéro 1 mondial du lait se font au détriment de la rémunération paysanne et de l’ensemble de la société. Nous demandons donc une revalorisation immédiate du prix du lait à la hauteur des demandes des organisations de producteurs livrant à Lactalis.

Alors que la Confédération paysanne Grand Est a mené une action devant la centrale d’achat Leclerc à Châlons-en-Champagne, nous poursuivons le rapport de forces pour obtenir une protection structurelle du revenu paysan via la couverture de l’intégralité de nos coûts de production, protection que la loi Egalim n’assure pas.

En effet, la loi Egalim prévoit seulement l’obligation de mettre un indicateur « coût de production » dans la formule du calcul du prix payé au producteur. Mais cet indicateur est loin d’être le seul pris en compte dans cette formule de calcul. C’est pourquoi le prix final payé au producteur peut demeurer inférieur au coût de revient.

La communication gouvernementale autour des contrôles de la loi Egalim n’est qu’un écran de fumée, tout en dévoilant l’absence de volonté de faire appliquer une loi pourtant en vigueur depuis plus de 6 ans et pourtant encore insuffisante pour protéger notre revenu face au déséquilibre structurel des filières alimentaires.

Sans réponse rapide de l’aval des filières alimentaires et des pouvoirs publics, nous en tirerons les conséquences pour agir dans la défense des éleveurs et éleveuses et faire plier les prédateurs de la valeur dont font partie Leclerc et Lactalis.

Un rapport de forces crucial s’est engagé ces dernières semaines pour obtenir un revenu paysan juste. La Confédération paysanne compte bien continuer à se mobiliser pour offrir un avenir serein aux paysan·nes et dénoncer les mécanismes d’accaparement de la valeur du travail paysan. Car des solutions existent et n’attendent que le courage politique de les appliquer :

·        L’interdiction d’achat de nos produits agricoles en-dessous du prix de revient, dans une loi contraignante et effective, ce que ne permettent pas les lois Egalim.

·        L’instauration de mécanismes d’encadrement des marges des industries agroalimentaires et de la grande distribution pour une meilleure répartition de la valeur dans les filières alimentaires.

·        L’interdiction des surmarges pratiquées par la grande distribution sur les produits de qualité, comme les produits AOC** ou labellisés en agriculture biologique.

·        La protection vis-à-vis des importations déloyales à bas prix au moyen d’outils de régulation des marchés et d’une rupture avec le libre-échange.

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Une deuxième salve d’annonces a été faite par le Gouvernement pour répondre à la colère des agriculteurs aujourd’hui. Plusieurs d’entre elles reviennent clairement sur des mesures mises en place pour protéger la santé publique et/ou l’environnement.

Alors que la grogne des agriculteurs se poursuit en France et en Europe, le Premier ministre Gabriel Attal a annoncé plusieurs nouvelles mesures lors d’une conférence de presse en milieu de journée. Plusieurs d’entre elles reviennent sur des mesures mises en place ces dernières années pour protéger la santé publique et/ou la biodiversité, notamment par la loi d’avenir agricole de 2014 ou la loi Egalim de 2018. Détails.

La FNSEA et les JA appellent à lever les blocages

A la suite de ces annonces, la FNSEA et les Jeunes agriculteurs appellent, « après consultation de leurs réseaux », à transformer le mouvement de contestation des agriculteurs, en suspendant les blocages. Ils invitent leurs adhérents à travailler avec les préfectures et les administrations à la mise en oeuvre des mesures annoncées. Ils posent néanmoins un ultimatum au Gouvernement afin que de premiers résultats soient présentés d’ici le SIA et que les autres mesures soient traduites dans la loi et la réglementation européenne d’ici juin.

Pesticides : une clause de sauvegarde et des mises à l’arrêt

Une clause de sauvegarde va être prise sur le thiaclopride, un néonicotinoïde interdit depuis 2019. Autrement dit la France va interdire les importations de produits issus de cultures traitées avec cette substance insecticide. Ces clauses de sauvegarde pourraient être multipliées, a précisé le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, tout comme la mise en place de clauses miroirs pour les importations.

Alors qu’il avait été soumis à consultation récemment, le plan Ecophyto est, quant à lui, mis à l’arrêt, le temps de la mise en place d’un nouvel indicateur et de « simplifications ». Pour rappel, l’indicateur actuel, le Nodu (pour nombre de doses utilisées) a régulièrement été mis en cause ces dernières années, notamment par les organisations agricoles. Un Conseil d’orientation stratégique va être installé dès la semaine prochaine afin que les travaux aboutissent avant le salon de l’agriculture (SIA), qui démarre le 24 février, a indiqué Gabriel Attal.

Par ailleurs, le Gouvernement va faire appel des décisions de justice annulant l’approbation de cinq chartes encadrant les zones de non-traitement (ZNT) afin « de sécuriser les choses et adapter les mesures », a indiqué Marc Fesneau. Ces chartes, attaquées régulièrement par les ONG, visent à réduire les distances réglementaires de sécurité lors de traitements phytosanitaires, en contrepartie de la mise en place de mesures de protection.

De même, le conseil stratégique sera également simplifié. Un délai dérogatoire d’un an a déjà été accordé récemment pour faire face à la lenteur de la mise en place des structures de conseil. L’objectif de ce conseil était d’accompagner les agriculteurs professionnels dans la construction d’une stratégie de lutte contre les bioagresseurs, dans le cadre de la mise en place de la séparation des activités de vente et de conseil, afin que ceux qui délivrent les conseils d’utilisation des produits phytosanitaires ne soient pas ceux qui les vendent.

Enfin, il n’y aura plus de surtransposition des règles européennes sur les substances, a annoncé le Premier ministre. « Que l’Anses se prononce sans coordination avec le régulateur européen n’a pas de sens », a déclaré Gabriel Attal, indiquant que « nous sortirons de cette situation ». Depuis 2015, l’Agence de sécurité sanitaire est chargée de l’évaluation et des décisions d’autorisation ou de retrait des autorisations de mise sur le marché (AMM) des phytosanitaires, alors que, jusque-là, ces décisions incombaient au ministère de l’Agriculture.

Concurrence internationale : clauses miroirs, contrôles et nouveaux OGM

Le principe de souveraineté alimentaire sera inscrit dans la loi, a indiqué Gabriel Attal. Des plans de souveraineté seront établis pour chaque filière soumise à forte compétition internationale, notamment l’élevage, a précisé le Premier ministre. En parallèle, la France soutiendra à l’échelle européenne le rejet de la viande de synthèse « qui ne correspond pas à notre vision française » de l’agriculture et de l’alimentation, et un meilleur étiquetage des produits, « enjeu de transparence pour les consommateurs et d’équité pour les agriculteurs ».

En revanche, en matière de nouveaux OGM« la position de la France est forte et claire, nous allons les promouvoir comme un outil de la transition écologique », a indiqué le ministre de l’Agriculture. Surprenant puisque la proposition actuellement étudiée à l’échelle européenne prévoit qu’une partie des produits issus de ces biotechnologies ne fassent pas l’objet d’un étiquetage visant à informer clairement le consommateur. De plus, l’Anses a récemment pointé du doigt les limites scientifiques de ce projet de règlement…

Le Premier ministre a réitéré l’opposition du Gouvernement au traité de libre-échange Mercosur, défendu la mise en place de clauses miroirs et de sauvegarde claires. « Nous proposerons la création d’une force européenne de contrôle pour lutter contre la fraude ». En France, les contrôles seront amplifiés également en 2024, pour lutter contre la fraude, les étiquetages frauduleux mais aussi le non-respect des lois Egalim sur les prix.

Alors que la Commission européenne a répondu en faveur de plusieurs demandes des agriculteurs sur les importations ukrainiennes ou sur les jachères, la France portera les attentes des agriculteurs sur les prairies et, en attendant, mettra en place une dérogation d’un an, a indiqué le Premier ministre.

Enfin, pour soutenir les filières locales et de qualité, le Gouvernement veillera au respect des objectifs Egalim dans la restauration collective, en veillant à une exemplarité de l’Etat.

Limiter les recours et accélérer les projets de retenues

Pour limiter les contentieux autour des installations agricoles, un décret sera présenté prochainement pour abaisser les délais de recours de quatre à deux mois, supprimer un niveau de juridiction et raccourcir les délais des contentieux à dix mois (contre deux ans aujourd’hui). Le Gouvernement va par ailleurs inscrire rapidement à l’agenda parlementaire une proposition de loi sur les troubles anormaux de voisinage visant notamment à poser un principe d’antériorité des activités professionnelles dans le cadre des conflits de voisinage. Les seuils pour les élevages liés à la réglementation sur les installations classées (ICPE) seront revus afin de « raisonner en tant qu’européens », a indiqué Marc Fesneau, sans plus de précisions. Des mesures d’assouplissement déjà annoncées en décembre dernier.

Sur l’eau, les projets seront « accélérés et soutenus », a confirmé le Premier ministre. Les collectivités départementales pourront participer au financement des dispositifs de sécurisation hydraulique, a indiqué le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu. Les agences de l’eau devront, quant à elles, arrêter des trajectoires de financement sur la réalisation de retenues, sur des équipements performants en matière d’irrigation et des « trajectoires plus larges de gouvernance ».

Le décret qui simplifie les règles pour le curage des cours d’eau a été publié au Journal officiel ce jeudi, a rappelé le ministre de la Transition écologique. Enfin, sur les zones humides, « trésors de biodiversité », les cartes qui circulent et qui inquiètent aujourd’hui sont « à regarder ensemble », a indiqué Christophe Béchu.

Ce dernier est enfin revenu sur la situation des agents de l’Office français de la biodiversité (OFB), ciblés aujourd’hui « mais pas seulement » par certains agriculteurs, « alors qu’ils font respecter les règles ». Des discussions vont être ouvertes pour présenter une convention dans le cadre du SIA afin d’encadrer les compétences, les pratiques et les modes opératoires, sur la base de la convention Demeter signée en 2019 entre les syndicats d’agriculteurs et la gendarmerie nationale.

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« On a une inquiétude globale sur les questions de démocratie environnementale »

Antoine Gatet réagit aux annonces de simplification du droit de l’environnement faites par le Gouvernement dans le cadre de la crise agricole. Il dénonce des mesures de régression au seul profit de l’agriculture industrielle.

https://www.actu-environnement.com/ae/news/interview-antoine-gatet-fne-on-a-une-inquietude-globale-sur-les-questions-de-democratie-environnementale-43403.php4#ntrack=cXVvdGlkaWVubmV8MzQ2NA%3D%3D[NTYwMzA0]