La Coop de l’eau 79 en faillite totale

Vers la fin des mégabassines ?

Suite à la parution d’une lettre d’information de la Coop de l’Eau 79 adressée à ses adhérents, nous faisons le point sur la situation concernant les méga-bassines du marais poitevin. Vous trouverez notre communiqué relatant notre analyse de la situation

Le Collectif Bassines Non Merci 79

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Alors que la Coop de l’eau 79 traverse une crise financière, judiciaire et sociale sans précédent, elle publie une lettre d’information qui sonne comme une tentative désespérée de sauver les apparences.

Le Collectif Bassines Non Merci tient à rappeler la réalité derrière les éléments de langage : le modèle des mégabassines est un échec, et ce ne sont ni les déclarations d’intention ni l’entêtement des porteurs de projets qui pourront masquer les faits.

En réalité, ce modèle « prend l’eau » de partout : décisions de justice défavorables, explosion des coûts, fuites d’adhérents, hausse insoutenable du prix de l’eau… L’aveuglement des pouvoirs publics et des promoteurs de ces projets écocidaires a mené à une impasse. Ce que nous dénonçons depuis des années est désormais reconnu jusque dans les rangs des irrigants eux-mêmes.

# D’un modèle présenté comme “solide”… à une structure en déroute

Créée pour construire et exploiter les méga-bassines, la Coop de l’Eau 79 s’effondre sous le poids de ses contradictions. Ses charges ont plus que doublé en deux ans, passant de 2,6 millions d’euros en 2022 à 6,6 millions en 2024. Pourquoi ? Parce que le projet repose sur un modèle ruineux et injuste.

Dans sa lettre d’information, la Coop de l’Eau 79 affirme rester « solide » et à « l’écoute de ses adhérents », alors qu’elle est à la dérive et que ses comptes sont plombés :

– Aides publiques suspendues par l’Agence de l’Eau,

Coûts de sécurisation délirants imposés (600 000 € pour la bassine de Sainte-Soline, 366 000 € pour celle d’Épannes),

Flambée du prix de l’électricité (+100 % en un an),

Remplissage et distribution d’eau des bassines à grands coups de pompes énergivores, pour une agriculture intensive non durable,

– Irrigants en fuite, lassés des hausses de tarifs et de la mauvaise gestion,

Jugement suspendant 4 bassines reconnues illégales en l’absence de dérogation ‘espèces protégées’ (dont celle de Sainte-Soline),

Volumes prélevables remis en cause par la justice,

Dettes en augmentation : 30 000 € de pertes irrécouvrables et 145 000 € de créances douteuses.

Prix de l’eau multiplié par 3 pour certains exploitants. L’eau coûte de plus en plus cher : de 31 à 86 centimes le m³ selon les projections internes. Pour beaucoup d’agriculteurs, c’est la goutte de trop.

Loin de constituer un <modèle de solidarité=, la Coop de l’Eau 79 organise la fuite en avant. Elle tente de masquer la débâcle en insistant sur les quelques bassines partiellement remplies (Priaires, Épannes, Mauzé), tout en passant sous silence leur coût énergétique, leur inefficacité hydraulique, l’abandon de nombreux irrigants et les tensions qu’elles provoquent sur le territoire. Rappelons qu’après 7ans, seules 13 exploitations (3 raccordées à la bassine de Priaires, 5 à Épannes, 5 à Mauzé) sur les 1900 que comportent le territoire profitent des + de 13 millions d’euros dépensés !

# Illégalité persistante : Sainte-Soline en cale sèche

Le dépôt annoncé par la Coop de l’Eau 79 d’une « dérogation espèces protégées » pour 2026, soit trois ans après le chantier de Sainte-Soline, confirme l’illégalité structurelle du projet et le cynisme d’une gouvernance qui construit sans se soucier de l’impact environnemental, et régularise – peut-être – ensuite. Et ce n’est pas une simple formalité : L’outarde canepetière, espèce menacée, y trouve ici son dernier refuge national. L’impact qu’inflige la bassine de Ste Soline sur les chances de survie et reproduction de l’espèce, bloque toute possibilité de remplissage depuis la décision de la Cour Administrative d’Appel de Bordeaux du 18/12/24.

Résultat : Sainte-Soline, la plus grande bassine, ne pourra pas être à nouveau remplie cet hiver ! Cela engendre un « gros manque à gagner » pour les 11 exploitations raccordées.

C’est une défaite de plus pour la Coop de l’eau 79. Pire, sans cette dérogation, la bassine de Saint-Sauvant (faisant partie de la 1ère tranche des travaux) ne pourra pas être construite du tout.

Malgré cela, la présidente du conseil départemental, Coralie Dénoues (qui a brillé par son ignorance sur le sujet et sur le fonctionnement du marais) persiste à soutenir ce modèle en déroute, évoquant un « grand cycle de l’eau » aux contours flous. Derrière les slogans, aucune réponse réelle à la crise de l’eau ni à l’avenir de l’agriculture paysanne. Aucun financement de ces projets n’apparaît dans le plan pluriannuel d’investissement du Département, dont ce n’est même pas la compétence directe.

Dans une posture de pseudo fermeté, Mme Dénoues déclare vouloir être « intransigeante » quant au respect du protocole d’accord de 2018 pour une agriculture durable, censé encadrer la mise en place des 16 méga-bassines du marais poitevin. Ce document, pourtant présenté comme une garantie, est aujourd’hui largement discrédité.

Comme l’a rappelé récemment Vincent Bretagnolle, directeur de recherche au CNRS et membre du comité de suivi scientifique et technique de ce protocole : « Ce protocole est caduc. Les engagements ont tous été piétinés durant six ans. »

En effet, la réduction de moitié des pesticides, la diversification des cultures, la transition vers l’agriculture biologique,… sont restées des promesses sans lendemain. Aucune contrainte réelle, aucun suivi transparent, aucun résultat à la hauteur des enjeux.

Quoi qu’il en soit, si Coralie Dénoues venait à persister dans son élan, il est clair qu’elle nous trouvera sur son passage. Nous ne laisserons jamais passer une reprise de gouvernance de la Coop de l’Eau 79 par le conseil départemental.

# L’argument de la “sécurisation” : l’arbre qui cache la forêt

La Coop de l’Eau 79 accuse les mobilisations citoyennes d’être responsables de ses difficultés budgétaires via les frais de sécurité.

C’est une inversion grossière de la réalité. Les millions gaspillés dans la vidéosurveillance et les grillages sont le symptôme d’un projet qui s’est imposé contre l’avis des citoyen-nes, des scientifiques, et de la justice. Un projet contesté doit être repensé, pas fortifié.

# Face à des promesses creuses, des agriculteurs piégés et désabusés

La Coop de l’Eau 79 défend un « stockage indispensable à la survie ». Mais de nombreux agriculteurs en paient déjà le prix, les mettant en difficultés :

– Certains n’ont jamais reçu une goutte d’eau des bassines,

– D’autres arrêtent l’irrigation, étranglés par les coûts,

– Dans le nord des Deux-Sèvres, certains paient pour un service qu’ils n’ont jamais eu,

– Sur le bassin du Thouet, la Coop de l’Eau 79 évoque elle-même la fermeture de la section, abandonnant de fait les irrigants du territoire.

Alors qu’elle prétend défendre l’agriculture locale, la Coop de l’Eau 79 précipite la faillite des fermes, au profit de logiques productivistes dépassées.

# Il est temps de tourner la page des bassines.

Nous en appelons à une rupture claire !

Ce naufrage n’est pas une erreur de gestion : c’est l’échec total d’un système fondé sur l’accaparement d’une ressource commune par une minorité, au détriment du vivant, de l’agriculture paysanne durable et de la justice sociale.

Le Collectif Bassines Non Merci appelle :

– à l’arrêt immédiat des projets de méga-bassines,

– à la fin des subventions publiques à ces ouvrages destructeurs pour une minorité

d’exploitations agricoles,

– à la mise en place d’une gestion partagée, collective et démocratique de l’eau,

– au soutien massif à la transition agroécologique, indispensable face au changement climatique.

L’eau est un commun. Sa gestion ne peut plus être confiée à une structure déconnectée, en faillite technique, morale et financière. Ce qui s’effondre aujourd’hui, c’est le vieux monde de l’agro-industrie et de la prédation.

L’agriculture a besoin de solidarité, de diversité, d’adaptabilité – pas de méga-bassines au service d’un petit nombre. La Coop de l’Eau 79 incarne un modèle dépassé, écologiquement nocif et économiquement insoutenable. Il est temps d’ouvrir les yeux. L’avenir se construira sans méga-bassines.

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