Le projet MAHA a séduit beaucoup de monde…
… en particulier les personnes hostiles aux pseudo-vaccins anti-Covid. Sur le papier, il comporte de bonnes mesures, dont certaines auraient pu être proposées par des scientifiques écologistes. Nombre de soignant.es enthousiastes ont considéré Kennedy comme une sorte de messie, persuadé.es que grâce à son programme, Trump allait redonner aux citoyen.nes la maîtrise de leur santé et se porter garant de leurs libertés (en particulier, la liberté vaccinale), ce qui témoigne d’une naïveté politique désarmante. En commentant dans son blog la décision prise par le président de retirer les Etats-Unis de l’OMS du fait de sa gestion irresponsable de la crise du Covid, le Dr Thierry Schmitz, par exemple, conclut que « L’Amérique nous rappelle que la liberté finit par triompher, quoi qu’il arrive » (07/03/2025). Dans un article du 23 septembre dernier, Lorraine Rossignol montre à un autre sujet que « la liberté d’expression, si chère au président américain, (…) ne vaut que pour lui… » (Télérama).
S’il est tout à fait légitime de s’insurger contre la dictature sanitaire mise en place lors de ladite crise, encore faut-il examiner de près ce que le gouvernement américain met en place. Compte tenu des décisions catastrophiques prises par Trump dans tous les domaines, on se doute bien qu’il y a loin de la coupe aux lèvres…
Le moins que l’on puisse dire, c’est que le président et son ministre de la santé n’auront pas fait illusion longtemps. Leur décision d’opérer des coupes sombres dans les budgets de la recherche scientifique va provoquer l’effondrement de cette dernière. Or la recherche américaine représente à elle seule près du quart des programmes mondiaux…
Quand on apprend que le gouvernement présente ses coupes budgétaires comme un « grand nettoyage » destiné à purger le pays de la corruption, on se pince : comment peut-on imaginer une seconde qu’un individu corrompu jusqu’à la moelle (une constitutionaliste soulignait que si Trump a pu accéder au pouvoir, c’est parce que rien dans la Constitution des Etats-Unis ne s’oppose à ce qu’un criminel soit élu à la présidence) pourrait sérieusement se fixer comme objectif d’assainir la société ? Autant compter sur Al Capone pour débarrasser Chicago de la pègre, ou confier à Joël Le Scouarnec la protection de la petite enfance…
Voici quelques éléments trouvés sur Internet lors de ma recherche, qui prouvent que le programme de Kennedy est de la poudre aux yeux et qu’il y a un décalage considérable entre les discours et les actes.
1) Références scientifiques inventées de toutes pièces
Le vaste rapport de Kennedy intitulé « Make America Healthy Again » cite des centaines d’études, mais son analyse par l’organisation de presse NOTUS a révélé que certaines de ces études n’existaient pas en réalité.
2) Promesse non tenue : manque de transparence
Kennedy a déclaré à plusieurs reprises qu’il apporterait une « transparence radicale » et une « science de haut niveau » aux agences de santé publique. Mais le secrétaire d’État a refusé de donner des détails sur les auteurs de ce rapport de 72 pages, qui appelle à un examen plus approfondi du calendrier vaccinal des enfants et décrit les enfants du pays comme étant sur-médicamentés et sous-alimentés.
3) Inadéquation entre les ambitions affichées et les moyens mis en oeuvre
« Ce dont nous avons vraiment besoin, c’est d’une refonte de notre notre système immunitaire de réglementation alimentaire aux États-Unis, ce qui signifie des ressources supplémentaires, du personnel supplémentaire à la FDA pour pouvoir examiner les nouvelles substances avant qu’elles n’arrivent sur le marché, et pour examiner les substances qui ont été ajoutées à l’approvisionnement alimentaire au cours des dernières décennies. Jusqu’à présent, les effectifs et les ressources de l’agence ont été réduits par la suppression massive d’environ 3 500 postes au printemps », déclare un témoin.
4) Des problèmes d’une gravité extrême sont traités avec une grande légèreté
C’est le cas, par exemple, des conséquences des rayonnements électromagnétiques sur la santé humaine. Le rapport aborde la question sans tenir compte de certaines études déterminantes en la matière, en particulier celles qui concernent les maladies infantiles, et se contente d’évoquer la nécessité d’effectuer des recherches supplémentaires – stratégie dilatoire très courante qui sert avant tout les intérêts des industriels…
L’un de mes correspondants m’apprend que Kennedy préconise l’utilisation de la montre connectée, qui implique le recours aux antennes-relais – dont la nocivité est établie depuis longtemps – pour surveiller la santé des jeunes !
5) Des avancées dans certains domaines masquent des régressions catastrophiques par ailleurs
Des critiques ont suggéré que l’accent mis par les dirigeants de la MAHA sur des questions comme les colorants et les additifs alimentaires sert à détourner l’attention du public de problèmes plus vastes qui ont un impact beaucoup plus important sur les maladies chroniques.
On insiste « sur les colorants alimentaires, afin que les gens ne remarquent pas que le plan consiste à réduire les soins de santé, l’assistance nutritionnelle, les protections environnementales, la recherche scientifique et nos agences de santé publique » (propos de la diététicienne Jessica Knurick, qui lutte contre la désinformation en ligne).
Les faits donnent raison à ces critiques puisque Trump a signé un projet de loi fiscale qui limitera Medicaid et fera perdre à quelque 12 millions d’Américain.es leur couverture d’assurance maladie au cours de la prochaine décennie. Kennedy a fait part de son soutien au projet de loi, affirmant que les réductions de Medicaid sont destinées à lutter contre « le gaspillage, la fraude et les abus » – argument officiel pour justifier les coupes budgétaires, dont nous avons vu ce qu’il vaut !
Les dictateurs ont toujours cherché à museler les intellectuel.les et les savant.es, et Trump ne fait pas exception. Ajoutons que s’il s’attaque tout particulièrement aux chercheurs et chercheuses qui travaillent sur le climat, la biodiversité, la pollution…, c’est pour garantir à l’industrie américaine la liberté de poursuivre ses activités sans avoir à respecter des normes environnementales (gaz de schiste, etc.).
6) Incohérence d’une politique qui prétend rendre la santé aux Américain.es tout en supprimant les normes relatives au respect de l’environnement
L’annonce récente de l’administration Trump selon laquelle l’Agence de protection de l’environnement (EPA) va revenir sur des dizaines de réglementations protégeant la qualité de l’air et de l’eau a suscité les louanges des groupes industriels et la condamnation des écologistes. Mais une partie prenante a brillé par son absence : le mouvement pour la liberté de la santé, connu sous le nom de MAHA.
Le mouvement « Make America Healthy Again » de Robert F. Kennedy Jr. a construit sa plate-forme autour des dangers des produits chimiques toxiques dans l’alimentation, l’eau et les médicaments. Pourtant, Kennedy et ses alliés sont restés silencieux jusqu’à présent alors que l’administration Trump ouvre la voie à plus de pollution, plus de toxines et une plus grande impunité des entreprises.
Sous Trump, l’EPA de Lee Zeldin a déclaré qu’elle ne tiendrait plus compte des coûts sociaux de la pollution lors de l’élaboration de ses politiques. Elle a éliminé les restrictions sur les émissions de mercure, de suie, etc., autant de polluants dont les liens avec les dommages neurologiques et les maladies respiratoires sont bien documentés. En conséquence, le mercure continuera à contaminer notre eau, notre air et nos aliments, et les polluants atmosphériques aggraveront l’asthme, affaibliront le système immunitaire et augmenteront les taux de cancers, de maladies cardiaques et d’accidents vasculaires cérébraux. En fait, l’EPA a décidé de révoquer la base juridique de la réglementation des gaz à effet de serre. Ce sont précisément les types de toxines environnementales qui constituent des menaces systémiques pour la santé humaine.
Ces renseignements proviennent d’une dizaine de sites américains dont je ne donne pas les références faute de temps. Mais comme toujours, j’invite mes lecteurs et lectrices à vérifier l’exactitude de ce que j’avance en recoupant les informations.
On trouvera ci-dessous des éléments complémentaires.
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« Un médecin à l’origine d’une recherche primée sur la maladie de Parkinson fait partie des scientifiques licenciés par les NIH ».
Des scientifiques de premier plan des National Institutes of Health, la principale agence de recherche médicale des États-Unis, ont été balayés mardi par la dernière vague de licenciements de l’administration Trump.
PLUSIEURS SCIENTIFIQUES DE HAUT NIVEAU chargés de superviser la recherche sur la prévention et la guérison des maladies au sein des Instituts nationaux de la santé (NIH) ont été informés qu’ils faisaient l’objet d’une réduction des effectifs mardi, dans le cadre d’une purge dévastatrice d’employés fédéraux menée par le secrétaire américain à la santé et aux services sociaux, Robert Kennedy Jr, a appris WIRED.
Plusieurs sources au sein des NIH, auxquelles l’anonymat a été accordé parce qu’elles n’étaient pas autorisées à parler aux médias, ont confirmé mardi après-midi qu’au moins 10 chercheurs principaux qui dirigeaient la recherche médicale au sein de l’agence avaient été licenciés. Parmi eux figure le Dr Richard Youle, un chercheur de premier plan dans le domaine des troubles neurodégénératifs, qui s’est vu décerner le Breakthrough Prize in Life Sciences pour ses recherches révolutionnaires visant à identifier les mécanismes à l’origine de la maladie de Parkinson.
Plusieurs sources des NIH ont indiqué à WIRED que les licenciements concernaient, outre le personnel des ressources humaines, de l’informatique et du travail, plusieurs chercheurs chevronnés de l’Institut national des troubles neurologiques et des accidents vasculaires cérébraux (NINDS), des scientifiques de haut niveau de l’Institut national du vieillissement, ainsi que plusieurs chercheurs réputés pour leurs travaux sur le VIH, les maladies infectieuses émergentes et les troubles cérébraux et neuronaux chez l’enfant.
Les laboratoires concernés par ces licenciements sont ceux qui participent aux essais cliniques et aux études précliniques. Selon le personnel des NIH, les plans concernant les données accumulées et le sort des patients participant aux essais en cours ne sont pas clairs…
Les NIH, qui constituent la plus grande source de financement de la recherche sur les causes, la prévention et la guérison des maladies humaines, ont été dépouillés mardi d’un personnel de soutien essentiel, dans le cadre de ce que le ministre de la santé, M. Kennedy, a qualifié de changement dans les priorités de son agence. Environ un quart du personnel de l’agence a été supprimé depuis le début du second mandat de M. Trump. »
Voici des exemples de témoignages que l’on trouve sur un forum consacré à la santé
« Espérons que ces scientifiques trouveront un emploi équivalent en Europe ou au Canada et qu’ils pourront poursuivre leurs travaux. La femme de mon neveu est également chercheuse en neurologie et ils envisagent de s’installer en Europe avec leur famille, mais la décision est difficile à prendre ».
« Si ces réductions étaient effectuées après que quelqu’un a examiné les détails et pris les décisions qui s’imposaient, ce serait une chose. Mais ce n’est pas le cas. Il ne s’agit que de coupes sombres inconsidérées. »
« La solution pour trouver des traitements efficaces/modificateurs pour (les) maladies (…) est et a toujours été d’avoir autant de chercheurs compétents que possible allant là où leur recherche (et d’autres) les mène sans crainte d’être punis pour avoir échoué à atteindre un résultat scientifique ou commercial. (…)
Les seules entités qui peuvent se le permettre sont les entités gouvernementales (c’est-à-dire le peuple en tant que collectivité) parce qu’elles n’ont pas besoin de présenter des résultats financiers trimestriels et que la recherche à un stade précoce ou intermédiaire n’est tout simplement pas rentable. Les mesures prises actuellement aux États-Unis vont absolument faire reculer la recherche (…) »