On désamiante la Ferblanterie

Avec les artistes et les artisans en dessous

Légitimes inquiétudes dans les rangs de celles et ceux qui occupent ce lieu de créations (artistiques et artisanales) ouvert en 2010 dans un ancien magasin de moto. Des ouvriers manipulent de l’amiante alors que tous les ateliers sont encore occupés.

Un article de Voix du Nord

«  Les dangers de l’amiante, et sa toxicité, avaient déjà été remarqués dès l’antiquité, lorsque son utilisation a débuté  » : voilà ce qu’on peut lire en guise d’introduction sur la page d’accueil de desamiantage.org, le site de référence sur le désamiantage. Difficile, dans ces conditions, d’imaginer qu’on puisse désamianter un bâtiment avec des gens en dessous. C’est pourtant ce qui est en train de se passer, rue Abélard, dans cet ancien magasin de motos, transformé il y a quelques années en lieu de création indépendant.

«  Dans le bail, il est bien précisé que le propriétaire a le droit de faire des travaux, souffle un membre du collectif de la Ferblanterie. Mais il est aussi indiqué que ça doit se faire sans déranger les locataires.  »

Le collège de la Ferblanterie se réunit le 17 janvier

Le dérangement est ici manifeste. Mi-décembre, une entreprise de la métropole lilloise débarque pour désamianter la toiture d’un bâtiment dans le fond de la Ferblanterie. Sur place, personne n’a été prévenu. Au regard de la dangerosité du produit, les artistes et les artisans s’attendaient à ce que les travaux soient accompagnés d’une palanquée de précautions. Voire même qu’on leur demande de quitter les lieux le temps du désamiantage. Eh bien non. «  Tout ça a été consigné. On a fait établir un constat d’huissier  », prévient Cyril, ébéniste, installé depuis 2013 et dont l’atelier est juste en dessous des plaques de fibrociment qu’on enlève et qu’on casse. «  On est en train de monter un dossier, photos à l’appui.  » Des analyses ont été effectuées sur ce qu’on respire et ce qu’on touche à la Ferblanterie. Les résultats seront connus dans quelques jours.

« On verra si on veut rester ici ou si on veut partir à la recherche d’un autre lieu. »

«  On ne se laissera pas faire !  », promet l’artisan. Pour arrêter les travaux, le collectif de la Ferblanterie est allé jusqu’à cadenasser l’accès au bâtiment. «  Mais les employés de l’entreprise de toiture sont finalement passés au-dessus de la grille.  »

Pourquoi tant de précipitation ? Le quartier de Lille-Sud est en pleine mutation (Décathlon et la cité de l’artisanat sont attendus). Il y a là 1 200 m² et autant de promoteurs intéressés qu’un curé peut en bénir.

Très vite, les soixante artistes et artisans de la Ferblanterie (lire ci-dessous) vont se poser la question de leur avenir. «  La Ferblanterie est organisée en mode collégial. Nous avons une réunion le 17 janvier. On verra si on veut rester ici ou si on veut partir à la recherche d’un autre lieu.  » Le bail que la Ferblanterie a signé avec le propriétaire court jusqu’au 1er janvier 2018.

Pour rappel, l’inhalation d’amiante est à l’origine de nombreuses pathologies pulmonaires, et notamment de cancers bronchopulmonaires, de la plèvre et des voies digestives.

www.laferblanterie.org

En chiffres

60

Le collectif de la Ferblanterie rassemble une soixantaine d’artistes et d’artisans, balayant divers horizons : une illustratrice plasticienne, un scénographe, un peintre performer, des vidéastes, une marionnettiste, une costumière, un photographe, un ébéniste ou encore une créatrice de bijoux…

2009

À l’automne, des artistes et des artisans s’installent rue Jean-Jaurès, dans le quartier de Moulins, dans une ancienne usine de fer blanc créée à la fin du XIXe siècle. C’est le début de l’aventure de la Ferblanterie.

2010

En novembre, la Ferblanterie doit déménager. Les artistes et les artisans du collectif posent leurs valises à quelques centaines de mètres de là, rue Abélard, à Lille-Sud, dans un ancien magasin de moto.