Les mots manquent. Surtout après deux ans.
Les médias occidentaux placent les vies israéliennes au dessus des vies palestiniennes
Au 7ème jour suivant 735 jours de guerre d’extermination du peuple palestinien par Israel et ses soutiens, on dénombre à Gaza plus de 238.146 blessés et martyrs (dont 257 journalistes et 78 prisonniers).
A Gaza, les Forces d’Occupation Israéliennes ont assassiné au moins 67.967 Palestiniens. On compte plus de 170.179 blessés, 9.500 personnes disparues et 2.000.000 citoyens déplacés.
463 citoyens dont 157 enfants sont morts de famine. Près des centres de distribution alimentaire on a compté 2.615 martyrs, plus de 19.177 blessés et 54 disparus.
En Cisjordanie dont Jérusalem, on dénombre 1.052 martyrs dont 211 enfants, plus de 7.000 blessés, 19.000 personnes arrêtées (dont 585 femmes et 1.550 enfants) et 47.000 citoyens déplacés.
Israel détient toujours 9.100 prisonniers politiques palestiniens dans ses prisons (dont 400 enfants, 52 femmes, 3.577 «administratifs »)
Communiqué de AFPS 59/62 en date du 17 octobre
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Deux années et plus de 67 000 morts, dont plus de 20 000 enfants, depuis le lancement de la guerre génocidaire d’Israël contre Gaza. Et trois fois plus de blessé · es. Soit, au total, de l’aveu même des responsables israéliens, 10 % de la population gazaouie. Par leur ampleur, les dégâts sont indicibles dans l’enclave palestinienne, qui a été occupée à 80 % par l’armée israélienne.
Une recension des anéantissements ne suffirait pas à décrire la situation actuelle : génocide envers le peuple palestinien dont les membres ont été qualifiés « d’animaux humains » ; écocide à travers plus d’une centaine de milliers de tonnes de bombes larguées et l’usage de phosphore blanc, arme dont l’usage est prohibé selon le droit international ; domicide comme l’illustre le ciblage de plus de 90 % des habitations et la généralisation de la vie sous tente pour les survivant · es ; épistimicide contre le savoir et les lieux de sa transmission, à travers la destruction des 12 universités du territoire et le ciblage des écoles de l’ UNRWA qui servaient de refuge pour la population ; nécrocide car l’explosion systématique des cimetières tue les morts une seconde fois…
Et la souffrance sans nom. Celle de ramasser les morceaux de corps de ses enfants, dont les parents ont écrit les noms sur leurs membres pour pouvoir les retrouver ; celle de survivre au meurtre simultané de dizaines de proches ; celle d’être affamé dans l’indigence ; celle de déplacements continus et aléatoires ; celle d’être dépossédé de son présent, de son passé, de sa mémoire et de son avenir ; celle de vivre aux abois face à une myriade de technologies de plus en plus meurtrières — ciblage de masse par l’intelligence artificielle, quadricoptères tueurs et robots explosifs, sans évoquer les bombardements aériens, d’artillerie et les snipers. Un génocide lucratif pour de nombreuses entreprises d’armement qui considèrent la Palestine, à l’instar d’autres « théâtres d’opérations », comme des laboratoires technologiques.
La complicité de la majorité des États occidentaux — États-Unis en tête —, par leur soutien inconditionnel, puise autant ses racines dans des traditions coloniales, génocidaires que racistes, qui s’assument sans fard dans nombre de médias dominants, en France majoritairement détenus par des milliardaires. Malgré l’argutie de quelques dirigeants, l’accomplissement de la barbarie en direct n’a donné lieu qu’à peu de sanctions effectives à l’encontre de l’État génocidaire. Le silence ou la complicité des États arabes, quand ces derniers n’instrumentalisent pas la « cause palestinienne » à des fins de politique intérieure, n’ont d’égal que la poursuite de la normalisation avec Israël dans la région. De l’Arabie saoudite ou de la Syrie, qui sera le prochain ?
Tout cela en faisant fi des atteintes itératives par Israël et ses complices au droit international et aux exigences humanitaires fondamentales. Malgré l’avis de la Cour internationale de justice, reconnaissant dès début 2024 le « risque de génocide » et les mandats d’arrêt de la Cour pénale internationale à l’encontre de Benyamin Nétanyahou et de Yoav Gallant, alors ministre de la défense, pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre, la situation n’a fait qu’empirer. Au-delà des civils ciblés, plus de 94 % des hôpitaux ont été détruits ou endommagés. Nombre de travailleurs humanitaires ont été assassinés, y compris des secouristes en activité. La coutume internationale n’a, elle non plus, jamais été respectée, comme en témoignent la violation unilatérale du cessez-le-feu de janvier 2025 ou encore la prise pour cibles de négociateurs palestiniens. Le constat laisse donc sans mot ni voix.
À l’heure où la première phase d’un nouveau cessez-le-feu a été conclue — apportant un peu de soulagement aux Gazaouis après un laisser-faire complet —, le destin de Gaza oscille désormais entre la survie et la déclinaison du « plan Trump ». Reste que l’autodétermination des Palestiniens semble n’avoir jamais été aussi éloignée. Ces derniers restent dépossédés de leur voix au chapitre.
Seules les mobilisations internationales face à cet écœurement continu, face à cette hypocrisie sélective des valeurs humaines et aux compromis de classes dirigeantes techno-fascistes, redonnent un peu d’humanité au genre humain. La criminalisation de cette solidarité et les accusations d’antisémitisme sont restées vaines : des manifestations aux boycotts, des sit-ins aux sabotages, en passant par les marches internationales, les caravanes et les flottilles, les peuples se soulèvent pour et par le soumoud, la ténacité de la résistance palestinienne. Une réaction non seulement humanitaire, mais avant tout politique contre le dernier avatar colonial, et son expanSionisme sans fin ni limites.
Plus de 270 journalistes ont été tués à Gaza, pour beaucoup délibérément, et les journalistes étrangers sont toujours interdits de pénétrer sur le terrain, sauf via d’exceptionnelles visites guidées par l’armée israélienne. Pour marquer les deux ans de cette guerre génocidaire, et poursuivre son travail d’information libre, le Réseau des médias indépendants sur le monde arabe publie, à travers un nouveau dossier, des contributions spéciales, principalement depuis Gaza.
Pour Assafir Al-Arabi , l’écrivain et chercheur Almeqdad Jamil Meqdad décrit le désarroi des départs forcés, complété par un texte du journaliste Abdallah Abou Kamil sur les tiraillements des adieux familiaux et la force du témoignage.
De son côté, Babelmed republie les lettres de Rola Abou Hashem, journaliste et mère de quatre enfants, qui évoque son quotidien sous les bombes.
Pour Nawaat , depuis Gaza, Ahed Farwana, secrétaire général du syndicat des journalistes palestiniens, détaille la ténacité du travail journalistique, à tout prix.
Enfin, Maghreb Émergent publie une synthèse d’analyses, dont un entretien avec un responsable palestinien en Algérie, sur le bilan de ces deux années de guerre génocidaire.
Orient XXI
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Le cessez-le-feu dans la bande de Gaza
Il doit ouvrir la voie à la fin de l’occupation illégale, de l’apartheid et du génocide
En réaction à l’annonce de l’accord entre Israël et le Hamas sur la première phase d’un cessez-le-feu, qui comprendrait l’ouverture immédiate de cinq points de passage permettant l’entrée de l’aide humanitaire dans la bande de Gaza, la libération rapide de tous les Israélien·ne·s et autres ressortissants encore en vie retenus en otage à Gaza en échange de prisonniers palestiniens, et le retrait partiel de l’armée israélienne de la bande de Gaza occupée, Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty International, a déclaré :
« Pour plus de deux millions de Palestinien·ne·s de la bande de Gaza occupée qui ont subi deux années de souffrances, de bombardements incessants et de famine systématique dans le contexte du génocide israélien, pour ceux qui sont retenus en otage par des groupes armés palestiniens et ceux qui sont détenus arbitrairement par Israël, un accord susceptible de mettre un terme aux horreurs de ces deux dernières années s’est fait cruellement attendre. Il n’effacera pas tout ce qu’ils ont enduré. Nous serons nombreux à scruter la suite pour être sûrs qu’il ne s’agisse pas à nouveau d’un bref répit.
« Une trêve ou une réduction de l’ampleur des attaques, ainsi que la permission de faire entre un mince filet d’aide humanitaire à Gaza, cela n’est pas suffisant. Il faut une cessation totale des hostilités et une levée totale du blocus. Israël doit autoriser la libre circulation des biens de première nécessité – nourriture, médicaments, carburant et matériaux de reconstruction notamment – dans toutes les zones de la bande de Gaza occupée, ainsi que le rétablissement des services essentiels, afin d’assurer la survie d’une population sous le choc de la famine, de vagues successives de déplacements forcés massifs et d’une campagne d’anéantissement. Enfin, l’armée israélienne doit se retirer de Gaza et une action urgente doit démarrer afin de reconstruire et réparer les infrastructures essentielles dans toute la bande de Gaza.
« Tous les Palestiniens déplacés à l’intérieur du pays, la plupart à plusieurs reprises, doivent pouvoir retourner sur leurs terres sans qu’Israël ne décide qui peut ou ne peut pas rentrer.
« Le Hamas et les autres groupes armés doivent libérer les otages pour mettre enfin un terme au calvaire qu’ils endurent depuis deux ans. Israël doit libérer tous les Palestiniens détenus arbitrairement, y compris sans inculpation ni jugement en tant que détenus administratifs ou combattants illégaux, en particulier les professionnels de santé détenus injustement pour avoir soigné leurs patients.
« Pour qu’un accord de cessez-le-feu s’avère durable, il doit s’ancrer fermement dans le respect des droits humains et du droit international, inclure la fin immédiate du génocide israélien contre les Palestiniens à Gaza, et englober des mesures concrètes visant à en finir avec l’occupation illégale de l’ensemble du territoire palestinien occupé et à démanteler le système d’apartheid.
« Le plan actuel – baptisé » plan de paix de Donald Trump » – est très lacunaire à cet égard. Il n’exige ni justice ni réparation pour les victimes de crimes atroces, pas plus que l’obligation de rendre des comptes. Afin de briser le cycle de souffrances et d’atrocités, il faut en finir avec l’impunité persistante qui est au cœur des violations récurrentes en Israël et dans le territoire palestinien occupé. Les États doivent respecter l’obligation qui leur est faite, en vertu du droit international, de traduire en justice les responsables présumés de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité ou de génocide.
« Le projet d’Israël visant à instaurer un « périmètre de sécurité » (zone tampon) sur les terres les plus fertiles de Gaza ne ferait que renforcer l’apartheid et l’occupation, et exacerber l’injustice. Tout projet visant à externaliser l’occupation de Gaza sans garantir le droit de circuler librement avec le reste du territoire occupé ne fera qu’aggraver la fragmentation territoriale sur laquelle repose le système d’apartheid israélien. Dans le même esprit, il faut rejeter les mesures modifiant la géographie et la composition démographique d’autres parties du territoire occupé, à savoir la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est.
« Le plan proposé ne garantit pas la participation pleine et entière des Palestinien·ne·s à toutes les décisions concernant l’avenir du territoire palestinien occupé, sa gouvernance et l’exercice de leurs droits. Un plan qui répète les erreurs et les échecs des initiatives passées, en faisant fi des droits humains et des causes profondes de l’injustice, ne parviendra pas à façonner un avenir juste et durable pour tous les habitants d’Israël et du territoire palestinien occupé.
Après deux années de deux poids, deux mesures et de vetos ayant paralysé le Conseil de sécurité de l’ONU alors que le monde entier assistait en direct à un génocide, il est temps de saisir l’occasion d’y mettre fin, de réparer ce qui peut l’être et de sauver ce qui reste de notre humanité commune. – Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty International
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L’horizon s’éclaircit un peu au Proche-Orient. Les négociations menées sous la pression des États-Unis de Trump a permis la libération des vingt otages vivants encore détenus par le Hamas, la restitution en cours des dépouilles des 28 otages tués, et le retour chez eux de près de 2000 prisonniers palestiniens (environ 8 000 autres seraient encore en détention en Israël, dont une partie sans jugement). Après deux ans de bombardements, de massacres, de blocus, 67 000 morts et 170 000 blessés, la population gazaouie peut enfin sortir à l’air libre.
Cette indispensable étape franchie, toutes les conditions pour qu’une paix durable soit envisagée sont encore loin d’être réunies. Parmi elles, figure le sort de la Cisjordanie, totalement oubliée pour le moment par le plan de paix. Le principal territoire palestinien est soumis à une colonisation accélérée, et à la brutalité qui l’accompagne, de la part du gouvernement d’extrême droite israélien. Alors que la récolte des olives débute, et que les attaques des colons contre les villages palestiniens isolés s’intensifient, nous y avons consacré un reportage. La journaliste Anne Paq a rencontré des volontaires palestiniens, israéliens et internationaux qui vivent quelques temps au sein de ces villages pour entraver la violence coloniale. Une sorte de protection civile non-violente, en attendant que les États se mettent enfin en mouvement pour faire cesser la colonisation.
Basta media, le 14 octobre
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Face aux attaques des colons contre les Palestiniens, l’interposition non-violente des volontaires internationaux
https://basta.media/Face-aux-attaques-des-colons-contre-les-Palestiniens-l-interpositi
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https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2025/10/17/pour-une-paix-durable