Une fois remis de la maladie …

Sera-t-on immunisé contre le coronavirus ?

Si de récentes études tendent à confirmer l’existence d’une immunité acquise contre le SARS-CoV-2, la question de sa durée reste encore à déterminer

Alors que 3,4 milliards de personnes sont confinées pour tenter d’endiguer la pandémie de Covid-19 et que plus de 950 000 cas d’infection ont déjà été officiellement recensés dans plus de 180 pays, certaines questions se posent désormais de manière accrue: que se passe-t-il une fois remis de la maladie? Sommes-nous immunisés et, surtout, combien de temps dure cette immunité?

Autant d’aspects sur lesquels les scientifiques s’interrogent sans que des réponses définitives puissent encore être apportées. Les données concernant le SARS-CoV-2 étant encore lacunaires, les chercheurs s’appuient sur les connaissances glanées lors des épidémies de SARS-CoV-1 et de MERS, mais aussi sur des travaux menés plus récemment sur le Covid-19, qui tendent à confirmer l’existence d’une immunité acquise contre ce nouveau coronavirus.

Déposée le 14 mars sur le serveur de prépublication bioRxiv, une étude conduite en Chine sur des macaques infectés par le SARS-CoV-2 a ainsi démontré que les singes produisaient des anticorps neutralisants leur permettant de résister à une nouvelle infection par la même souche de SARS-CoV-2. Par ailleurs, un article paru le 16 mars dans Nature Medicine sur le cas d’une patiente chinoise semble également montrer l’existence d’anticorps chez les personnes présentant des symptômes légers et modérés de la maladie. «De ce que l’on sait jusqu’à présent, et par analogie avec d’autres infections virales, il semble invraisemblable que l’on puisse être infecté à plusieurs reprises au cours d’une même épidémie», appuie Manuel Schibler, médecin au laboratoire de virologie des Hôpitaux universitaires de Genève.

Faux négatifs

Comment dès lors expliquer les cas relatés de réinfections en Asie ? Selon un travail en pré-impression publié le 26 mars dans medRxiv et conduit entre plusieurs instituts chinois et le Massachusetts Institute of Technology (Etats-Unis), sur 260 patients touchés par le Covid-19 et testés de nouveau positifs, plusieurs facteurs explicatifs peuvent être avancés. Parmi ces derniers, la question de la fiabilité des tests de dépistage, dits PCR, est notamment mise en avant.

Il s’avère en effet que les tests commerciaux utilisés dans les hôpitaux peuvent non seulement produire des résultats faussement positifs – lorsque du matériel viral reste dans le sang alors que la personne n’est plus infectieuse – mais également de faux négatifs, dans une situation où, par exemple, l’écouvillon servant au prélèvement n’aurait pas collecté suffisamment de matériel. Ce manque de sensibilité pourrait expliquer pourquoi des personnes atteintes par le Covid-19 ont été testées négatives à leur sortie de l’hôpital, puis positives plus tard, laissant croire à une possible réinfection alors que celle d’origine était en réalité probablement toujours présente.

Immunité à géométrie variable

Reste une question: combien de temps pourrait durer une immunisation au SARS-CoV-2 ? «Pour certaines pathologies comme la polio ou la varicelle, elle peut perdurer toute la vie, alors que pour beaucoup d’autres, ce n’est pas le cas, explique sur son compte Twitter Nicolas Christakis, directeur du Human Nature Lab de l’Université de Yale dans le Connecticut. En ce qui concerne ce coronavirus, il faudra, pour le savoir, davantage de recul, et nous n’en sommes qu’au début de l’épidémie. Tout ce que nous pouvons faire, pour le moment, c’est attendre et observer.»

La réponse immunitaire aux différents virus de la famille des coronavirus peut, par ailleurs, considérablement varier, rendant difficile toute estimation. Ainsi, ceux circulant en boucle dans les populations humaines et causant des pathologies bénignes, comme des rhumes, induisent une immunité oscillant, selon les calculs, entre trois mois et trois ans. Coévoluant avec le système immunitaire humain depuis des milliers d’années, ces virus se sont probablement adaptés à leurs hôtes pour devenir moins virulents, tout en parvenant à mieux manipuler notre réponse immunitaire.

Quant à l’épidémie de SARS-CoV-1 ayant sévi en 2003, les niveaux d’anticorps semblent rester stables durant environ deux ans, une étude rétrospective ayant même montré, chez de rares personnes, la présence d’immunoglobulines de type G – une classe d’anticorps – jusqu’à six ans.

Face à autant d’inconnues, les experts scientifiques s’accordent sur un point : le seul moyen efficace d’avoir une protection sur le très long terme est l’administration d’un vaccin contre le SARS-CoV-2, dont la mise à disposition pourrait intervenir d’ici neuf à dix-huit mois.

https://www.letemps.ch/sciences/une-remis-maladie-seraton-immunise-contre-coronavirus