L’équipe médicale de Notre-Dame-des-Landes fait son bilan

Ainsi qu’une lettre ouverte à un député LREM … et des nouvelles de Vinci !

Communiqué de presse de l’équipe médic de la zad et du collectif de soignants mobilisés par rapport aux expulsions sur le site de NDDL, 19 avril 2018

A la sortie de la rencontre entre la délégation intercomposante et la préfecture, Nicolas Hulot a déclaré lundi “Je veux témoigner de la retenue des gendarmes dans une intervention difficile.” Depuis le début des expulsions sur la ZAD de Notre-Dame-des-Landes le 9 avril dernier, nous (équipe médic et collectif de soignants mobilisés) avons comptabilisé 272 personnes blessées dont 10 dans un état grave qu’il a fallu évacuer. Est-ce donc là un signe de retenue ? Ce bilan est non exhaustif et sous-estimé car nombre de personnes blessées ne sont pas soignées par nos équipes. Néanmoins, nous pouvons souligner une augmentation continue du nombre de blessés avec une augmentation du nombre d’évacuations nécessaires à la prise en charge de blessures graves :

Photo :

https://zad.nadir.org/local/cache-vignettes/L500xH375/imgp3592a-6e279….

– hématomes à l’abdomen, au thorax et au visage secondaires à des tirs tendus de flashballs
– atteinte des organnes génitaux externes à la suite de tirs tendus de flash ball
– eclats de grenades au visage, dans les extrémités, au niveau du thorax
– explosions délabrantes au niveau des membres
– troubles neurologiques & auditifs secondaires aux effets de blast des explosions.
– infection sévère suite à des éclats de grenades enfoncés profondément dans le corps nécessitant une extraction chirurgicale et une antibiothérapie (cf photos sur https://zad.nadir.org/spip.php?article5605)

Tout cela sans comptabiliser le nombre colossal de personnes souffrant de stress post-traumatique actuellement ou à venir, compte-tenu de la violence des événements.

Les forces de l’ordre utilisent leurs armements de façon potentiellement létale avec :

– des tirs tendus de flahballs ou de grenades au niveau du tronc ou de la tête
– des grenades de désencerclement lancées par-dessus des haies sans visibilité ou bien directement au milieu de la foule. Certaines de ces grenades sont ainsi tombées dans les capuches ou les sacs à dos des personnes présentes. La survie de ces personnes est liée à la présence d’esprit et au courage des témoins qui les ont ôtées. La gendarmerie affirme utiliser des armes non létales. Néanmoins, 4 gendarmes (dont 2 ont été transférés en service de réanimation) ont étés hospitalisés suite à l’explosion d’une de leurs propres grenades.

De plus, les postes de secours medic ont du se déplacer a plusieurs reprises. Pour cause : ils étaient soit noyés dans le gaz lacrymogène, soit dans un endroit où l’intervention de la gendarmerie était imminente. Nous soulignons que cette dernière était au courant des emplacements de ces postes médicaux et a ainsi mis en difficulté la prise en charge des personnes blessés. L’évacuation d’une personne blessée a été entravée par les gardes mobiles, qui, après avoir autorisé le passage de l’ambulance, l’ont à nouveau bloquée avec 2 véhicules blindés. Après avoir trouvé refuge chez des habitant.e.s choqué.e.s par cette situation, il a fallu attendre plus de 30 minutes l’arrivée des pompiers.

L’usage des armes n’est donc pas défensif mais bien offensif : des foules ne présentant aucune menace et/ou étant en train de se disperser ont été visées a plusieurs reprises (notamment dimanche). Des pluies de grenade on était larguées systématiquement sur les chemins de replis, rendant la fuite dangereuse et parfois même irréalisable.

C’est pour toutes ces raisons qu’un collectif a décidé, le mercredi 18 avril 2018, de saisir le défenseur des droits, Mr Jacques TOUBON, par rapport aux violences policières sur la Zad.

Aujourd’hui, nous sommes témoins des mutilations & nous aurions d’ors et déjà pues être confrontés a des morts. Cet usage démesuré de la force de l’État n’est rien d’autre que l’instrument de la terreur qu’il tente d’injecter au sein de notre lutte, et dans bien d’autres espaces d’organisation. L’État met toutes les conditions en place pour qu’un mort soit déploré sur la Zad lors d’une opération d’expulsion ou de maintien de l’ordre, ce qui s’apparenterait à un assassinat commandité. Serait-ce la porte de sortie choisie par l’Etat pour se dépétrer de l’enlisement qu’il a lui-même créé ? A partir du 23 avril, le gouvernement français serait-il prêt à tuer des individus pour combattre une forme d’organisation collective ?

Nous affirmons toute notre solidarité aux victimes des violences policières et de la répression d’Etat.

Photos de quelques blessures ci-dessous :

Blessures causées par les armes de la police

Cartographie réalisée avec une personne blessée de toutes les lésions constatées sur son corps

Hématome dans le cou suite à un tir tendu de flashball ou de grenade lacrymogène

Éclat de grenade dans le lobe de l’oreille

Blessure au cou

Blessure au genou

Blessure à la main

Blessure aux mollets

Blessure au tibia

Blessure au visage

Jambes criblées d’éclats de grenade

Pour voir les photos :

https://www.legrandsoir.info/communique-de-presse-de-l-equipe-medic

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4000 grenades tirées

https://lundi.am/ZAD-4000-grenades-tirees

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Où est passé Vinci ?

En 2008, alors que vient d’être réactivée la déclaration d’utilité publique, c’est l’association AGO : VINCI et ses banquiers associés , qui est appelée par le gouvernement et la région pour construire un aéroport sur la ZAD tandis que l’espace libéré par l’ancien aéroport déjà partiellement urbanisé avec un réseau de communication déjà existant devient un terrain de choix pour une opération immobilière importante et juteuse.

Las, tandis qu’avec l’abandon de l’aéroport les campagnols pouvaient espérer un moment de tranquillité sur le terrain de NDDL, les humains qui ont aidé à leur victoire ont dû subir l’assaut de la soldatesque du gouvernement.

Mais où est donc passé VINCI, ce dévoreur d’aéroports qui depuis l’abandon du projet est devenu d’une discrétion de violette et à ma connaissance n’a encore poussé aucun gémissement dans les média sur ce qu’il devrait considérer comme une dépossession indigne de ce qui, déjà, semblait lui appartenir ?

Bien sûr, on a bien noté que, sans vouloir établir une relation de cause à effet, le gouvernement, pardon, le Conseil d’Administration de l’aéroport de Lyon St Exupéry, société anonyme propriété de l’état à 100% vient de lui accorder un droit d’entrée dans ce même conseil d’administration , mais ce strapontin serait une bien pauvre compensation face à l’énorme affaire de l’aéroport de NDDL couplé à une possible urbanisation de l’ancien aéroport.

Alors, pourrait-on envisager que l’ancienne alliance VINCI- région fonctionne toujours ?

Vinci, en tout état de cause, reste gestionnaire de l’aéroport de Nantes Atlantique pour lequel l’état va lui financer gratos un agrandissement. Serait-il possible qu’en plus on puisse envisager de reporter l’opération immobilière dont il est question plus haut vers l’espace libéré de NDDL ?

C’est impensable, bien sûr, on ne peut envisager un tel cynisme et une telle duplicité !

Contentons-nous d’examiner les faits connus :

  • Bruno Retailleau et les représentants du Conseil régional des pays de la Loire dont il était il y a peu le patron, tous connus pour leur volonté de bétonner à tous prix le périmètre de la ZAD y compris en gazant au lacrimo les occupants sans titre demandent à l’état de rétrocéder à la région toutes les terres de cette zone qui, de fait, appartiennent à l’état. Pour y développer un projet agricole et écologique ?
  • Le gouvernement utilise toutes les ficelles possibles pour éviter que les zadistes ne défendent un projet collectif qui, une fois entériné, rendrait la zone inexpugnable pour d’éventuelles spéculations, agricoles ou immobilières au moins le temps d’un bail emphytéotique (jusqu’à 99 ans) comme au Larzac.
  • La violence de l’attaque lancée contre les zadistes y compris les installations agricoles, si elle étonne de moins en moins sur un territoire français ou l’ordre règne dans le mépris de ses habitants et de leur environnement, est tout de même un marqueur dans l’attitude du pouvoir à l’égard de la nature.

Je laisse au lecteur la liberté de penser à quoi rêvent les socialistes macronisés du conseil régional et à ce qu’envisage Jupiter comme avenir pour la ZAD (redevenue Zone d’Aménagement Différée) où une population de paysans sans terres (certains ayant été expropriés) ont rêvé, eux, de vivre en paix et en harmonie avec la nature.

Une fois encore c’est la puissance publique qui fixe l’agenda et après tout c’est bien normal dans une démocratie.

Problème : sommes-nous encore en démocratie ?

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Lettre ouverte à Monsieur Philippe Chalumeau, Député LREM de la 1ere circonscription d’Indre-et-Loire, membre de la commission de la défense nationale et des forces armées,

Combien a pu coûter le déplacement de 2 500 pandores pour bousiller une bergerie, deux boulangeries, des fermes, des logements, des poulaillers ? Fallait-il une force armée pour régler un différend de bail rural ?

Combien a coûté l’opération de Notre-Dame-des-Landes du lundi 9 au samedi 14 avril 2018 ?

Je suis assez perplexe. 2 500 gendarmes avec blindés, armes, hélicoptères, drones, état-major de campagne… et tout ceci pour, au final, détruire deux boulangeries, une bergerie, une place de marché, une ferme, une grange et des potagers. La touche grotesque finale : le déplacement du premier ministre et du ministre de l’Intérieur (à l’école du gaz voisine, ça ne s’invente pas), venus poser dans une mâle attitude, une fois la razzia opérée. Cette sinistre fanfaronnade n’aura vraisemblablement servi à rien, puisque les habitants de la ZAD vont reconstruire, aidés en cela par des milliers de personnes, dont je suis, choquées par l’opération militaire, ou plutôt l’expédition punitive. Toujours est-il, que certains observateurs, parlent d’un budget, à la louche, d’un million par jour pour ces agapes.

« L’ordre règne, le paysage est en ruine »

Votre gouvernement voulait montrer ses biceps, nous n’avons vu qu’une déferlante barbare, destructrice. La majorité à laquelle vous appartenez est en capacité de saccager une zone de production agricole, ruinant ainsi les projets des habitant(e)s. Quel talent ! Quel courage !

Bravo, l’ordre règne, le paysage est en ruine, pollué de milliers de cartouches de grenades diverses, les plantations de printemps sont foutues, les serres défoncées, des centaines de personnes pacifistes sont blessées, certaines gravement. Votre mentor a beau clamer aux marches des églises qu’il faille restaurer le lien avec les tenants du goupillon, il entretient sa popularité au gaz lacrymogène et aux coups de matraque. Chez Jupiter, le vin de messe a une odeur de poudre à canon.

La presse, comme au bon vieux temps de la guerre d’Algérie, n’était pas conviée. Des images clandestines (on en est là) ont heureusement passé la censure militaire. On y voit de fiers pandores gazer de dangereux retraités, tirer à la grenade sur des jeunes gens et raser des bâtiment agricoles avec des blindés.

Les gendarmes n’étaient pas venus les mains vides : fusil FAMAS (arme de guerre), LBD 40 pour tir de grenades, MP5 (pistolet mitrailleur qui tire des balles de parabellum 9 mm). Tout ceci en plus des gazeuses, des flash-ball et autres tonfas. C’était aussi le salon de l’auto-mitrailleuse de Notre-Dame-des-Landes avec, en vedette, le VBRG, véhicule blindé à roues de la gendarmerie, équipé, modestement, de mitrailleuses de 7,62 et de lance-grenade [1]. Jupiter est prudent.

Le porte-avions Charles de Gaulle n’a pas fait le déplacement. Aux dernières nouvelles, les gueux auraient perdu la bataille, incapables de protéger leurs maisons devenues ruines sous les brodequins.

Dans le même temps, plusieurs facs de France ont été investies par les CRS qui ont tabassé les étudiants en AG. Pouvez-vous me renseigner ? Les AG sont interdites aujourd’hui ? Un vote à l’assemblée aurait eu lieu en ce sens ? Je concède aussi que votre parti a gagné la bataille du savoir dans les facs, les CRS à coups de lacrymos et de tonfas ont déblayé Nanterre, la Sorbonne, et bien d’autres lieux de la chienlit. Jupiter cire ainsi les pompes du grand Charles.

Est-il nécessaire de pratiquer un tabassage en règle à l’encontre de celles et ceux qui pensent différemment de votre parti ? Vendredi 13 avril, au matin, à Tours, une manifestation de lycéen-nes (enfants de 15 à 18 ans, pour mémoire), était suivie par trois camionnettes de police. Les flics étaient armés, casqués, avec gilet pare-balles ! Pour des lycéen-nes ?

Depuis la mort de Rémy Fraisse (tir de grenade offensive par la gendarmerie, pas de procès, pas de coupable) il y a quatre ans, un déchaînement policier hors norme est d’usage pour toute contestation. Cette politique de junte est en augmentation depuis votre arrivée au pouvoir. Il n’est pas rare que les plus fragiles y laissent leur vie : une migrante nigériane enceinte, refoulée par la gendarmerie en toute illégalité, est morte le 31 mars dernier.

De Calais à la frontière italienne, la police arrête ou harcèle celles et ceux qui témoignent d’humanité envers les migrants. À Calais toujours, la police balance des gaz lacrymogènes pendant les distributions de repas. Lors des manifestations à caractère social, des militant-es sont tabassé-es, arrêté-es, ainsi que des journalistes.

Une violence à géométrie variable

Cette violence barbare est à géométrie variable puisqu’elle ne concerne pas les délinquants fiscaux (60 à 85 milliards par an), ni les fachos des facs de Montpellier ou de Strasbourg, ni la délinquance patronale (l’amiante tue encore 1 700 personnes par an en France).

Le procès de « Tarnac » a confirmé la pantalonnade de pieds nickelés montée par une ministre et un procureur en plein délire sécuritaire. Votre formation politique alimente les livres d’histoire à venir, il faudra se retenir de rire quand on verra que des centaines de blindés ont terrassé des brouettes dans une cour de ferme et que Jupiter parlait de l’État de droit.

À l’heure où nous fermons des hôpitaux, des écoles, des lignes de chemin de fer, des postes et des perceptions, au moment où vous amputez les revenus des retraités, sabrez les allocations logements, je serais heureux de connaître le coût des opérations de maintien de l’ordre, à commencer par celui de Notre-Dame-des-Landes, mais aussi d’une façon globale celui lié au maintien de l’ordre dans les universités et dans les manifestations à caractère social.

Je pense qu’appartenant à la commission de la défense nationale et des forces armées, cette recherche ne devrait pas vous poser de problème(s) particulier(s) et j’espère donc vous lire rapidement.

Pour populariser votre réponse, je mets ce courrier en lettre ouverte dans La Rotative, journal collaboratif de Tours.

Michel ANCE, habitant de votre circonscription, Syndicaliste.

Pour plus d’informations :

http://piquetdegreve.blogspot.fr/

ou larotative.info

Notes

[1] La mitrailleuse fait partie de l’équipement théorique de ces VBRG, mais ils ne semblaient pas en être dotés depuis le début de l’opération contre la ZAD.