Rembourser la dette et mourir ?

Ce qui nous attend.

Ce que la Grèce nous apprend.

Près d’un million de morts chaque année au sein de l’Union européenne ?

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Grèce : 22.000 morts chaque année. Au nom de quoi ?

Suite à la crise financière de 2007/2008, 27 des 28 pays membres[1] de l’Union européenne (UE) ont été unanimes pour infliger au 28ème, la Grèce,  un traitement d’une violence inouïe qui lui a valu de connaître d’une surmortalité annuelle de 22.000 personnes[2] chaque année à compter de 2011. Au nom de quoi ? De l’austérité nécessaire, selon ces 27 procureurs, pour redresser les comptes de la Grèce qui avaient été maquillés par des banquiers d’affaires, eux-mêmes à l’origine de la plus grande crise depuis 1929 (avant que n’éclate celle du coronavirus). Unanimité ! Impossible à obtenir quand il s’agit d’introduire ne serait-ce qu’un soupçon de progrès dans le Far-West fiscal qui règne au sein de l’UE, les règles de « comptables fous » au pouvoir depuis des décennies (tant au sein des États que des Institutions internationales) parviennent à l’imposer pour respecter ces sacro-saints équilibres où l’homme n’a pas sa place. Parmi ces 27 procureurs, 6 paradis fiscaux qui n’ont de cesse de porter atteinte à l’équilibre financier de leurs voisins et les autres, tous les autres, y compris ces paradis fiscaux, qui veulent d’abord que les intérêts de leurs banquiers soient sauvegardés. Tout ça n’a pas de prix pour tous ces experts qui ne sont comptables que de leurs chiffres et pas des dizaines de milliers de morts qu’ils provoquent. L’important est de rassurer les marchés. Inquiets avant que n’entrent en œuvre les mesures d’austérité, leur moral est gonflé à bloc quand elles produisent leurs effets, qui eux, épuisent tous les autres (qui ne sont pas morts).Et rien ne les arrête ! Le supplice est planifié, scandé dans le cadre de mémorandums successifs qui s’imposent de manière dictatoriale à tout un peuple : le 1er en mai 2010, le 2ème en janvier 2012 et le 3ème en août 2015. Et le joug n’est pas près d’être levé : dans les années 2060 peut-être si l’on en croit les bourreaux.

Une surmortalité de 22.000 personnes chaque année. Rendons-nous compte ! Pour un pays de 10,7 millions d’habitants. C’est l’équivalent pour la France (67,0 millions d’habitants) de 137.000 morts chaque année et pour l’Union Européenne (446,0 millions d’habitants) de 913.000 morts.

Une Troïka à l’affût, d’apparence renouvelée, mouillée jusqu’au cou dans le supplice Grec.

Alors que la pandémie du Covid-19 n’est pas encore jugulée, que les conditions du déconfinement font craindre une deuxième vague, les « comptables fous » nous disent déjà que les milliers de milliards € de dette supplémentaire qui en résultent vont bien devoir être remboursés. Que croyez-vous qu’il va alors arriver ? Les tenants du pouvoir ont-ils changé depuis 2011 ? Christine Lagarde, patronne de la Banque Centrale Européenne (BCE) depuis octobre 2019, l’avait été du FMI depuis juillet 2011 jusqu’à son atterrissage à la BCE. Ursula von der Leyen, patronne de la Commission Européenne depuis décembre 2019 a été ministre fédérale d’Angela Merkel de 2005 à 2019. Quant à Kristalina Gueorguieva, patronne du FMI depuis octobre 2019, elle était auparavant directrice générale de la Banque Mondiale depuis 2016 après avoir été membre de la Commission Européenne dès 2009 : bref une Troïka d’apparence renouvelée où le jeu de chaises musicales est en vigueur et mouillée jusqu’au cou dans la férocité du traitement infligé à la Grèce[3].

La « guerre » contre le Covid-19 pour plus de la moitié de l’humanité, le paradis pour les 0,1%

Qu’il s’agisse des dirigeants des États membres, de la Commission européenne ou de toute autre institution internationale, face à la crise du Covid-19, aucun n’a déclaré qu’il fallait mettre un terme à l’évasion fiscale[4] qui coûte chaque année 1.000 milliards € à l’Union européenne, 100 milliards à la France et plus de 30 milliards à la Belgique. On est en guerre à en croire nos dirigeants, mais les paradis fiscaux destinés aux 0,1% de l’humanité sont toujours là et les organisateurs de l’évasion fiscale continuent à conseiller nos gouvernements et les institutions européennes pour lesquelles la stratégie du renard dans le poulailler semble être de constante application puisqu’elles viennent de s’adjoindre les services de BlackRock[5] comme conseiller environnement en charge de recommander les mesures à prendre pour intégrer au mieux les facteurs environnementaux et sociaux dans la supervision bancaire.

Un traitement « à la Grecque » imposé à l’ensemble de l’Union européenne ? Près d’un million de morts chaque année ?

L’évasion fiscale va donc continuer à croître comme elle le fait sans cesse depuis plusieurs décennies. Pourtant, dans le même temps, nos dirigeants déclarent que les impôts n’augmenteront pas (pour ceux qui les paient, les « contribuables captifs »). Peut-être même diminueront-ils pour quelques privilégiés inquiets de voir leurs magots écornés ? Toujours au nom de la même stratégie consistant à « affamer la bête » (« to starve the beast », selon la doctrine élaborée par J.M. Buchanan, Prix Nobel d’économie en 1986), les ressources destinées à financer les services publics feront l’objet d’impitoyables coupes sombres, les cotisations sociales à la charge des employeurs seront réduites sans distinguer les PME des multinationales, celles à la charge des salariés le seront aussi entraînant entre autres une baisse drastique des retraites. Et puis, pour renflouer la trésorerie des États, leurs actifs seront vendus à des puissances privées (aéroports, patrimoine immobilier d’État, etc.).

Alors, 913.000 morts chaque année pendant plusieurs années, massacre décidé à l’unanimité par les gouvernements de l’UE et la Troïka qui les encadre ? Y croire ou pas ? Mais que pouvons-nous attendre d’autre si ceux qui nous ont conduits là où nous en sommes sont toujours aux commandes, eux qui ont utilisé la Grèce comme cobaye ? Rien d’autre. Le programme est déjà prêt. Il ne reste plus qu’à le décliner à l’échelle de l’UE.

Ne pas se plier à une servitude volontaire[6] mortelle

Alors, n’attendons pas. Attendre, c’est laisser filer des centaines de milliards, prêtés aux banques privées par la Banque Centrale Européenne, vers la spéculation au profit de quelques-uns. Attendre, c’est se plier à « une servitude volontaire » mortelle.

En 2011, l’Institut Polytechnique de Lausanne démontrait que 147 firmes transnationales contrôlaient 40% de la finance et de l’économie mondiales et que 737 en contrôlaient 80%. Près de 10 années après, cette phénoménale concentration s’est à coup sûr amplifiée. En 2017, 82% des richesses créées ont été accaparées par les 1% les plus riches de l’humanité. Laisser se poursuivre ces concentrations vertigineuses, cette évasion fiscale qui aboutit à un véritable apartheid fiscal entre ceux qui s’évadent et ceux qui paient n’est pas une fatalité ! (chacun peut porter plainte contre les organisateurs de l’évasion fiscale par simple mail)[7]. L’argent est là. Il n’est pas trop tard. Agissons ensemble pour que la finance soit mise au pas et soit enfin au service du citoyen.

Et pour agir en connaissance de cause, souvenons-nous des déclarations de Jean-Claude Juncker Président de la Commission Européenne au lendemain des élections grecques de janvier 2015 dont les résultats ne lui convenaient pas : « Il ne peut y avoir de choix démocratique contre les Traités européens ». Nous sommes prévenus.

Et personne ne nous rappellera chaque soir sur les chaînes d’information en continu le macabre décompte des morts de l’austérité si nous ne réagissons pas. Le massacre sera silencieux.

pour.press

 

Notes

[1] L’Union Européenne comptait 27 pays membres jusqu’à fin 2007. C’est à partir de juillet 2013 qu’elle en a compté 28 avec l’arrivée de la Croatie.
[2] https://www.thelancet.com/journals/lanpub/article/PIIS2468-2667(18)30130-0/fulltext

http://sante-grece-67.fr/2018/10/grece-l-austerite-tue-en-voila-les-chiffres.html
[3] La Commission Européenne a été dirigée par José Manuel Barroso (Portugal) de 2004 à 2014, puis par Jean-Claude Juncker (Luxembourg) de 2014 à 2019. Ursula von der Leyen (Allemagne) lui a succédé. La Présidence de l’Eurogroup a été assumée par Jean-Claude Juncker du 01/01/2005 au 21/01/2013, puis par Jeroen Dijsselbloem (Pays-Bas) jusqu’au 12/01/2018. Les commissaires européens aux affaires économiques et monétaires ont été les suivants : Olli Rehn, Finlandais de 2010 à 2014 puis Pierre Moscovici (France) de 2014 à 2019.
[4] Lire grande enquête sur l’évasion fiscale.
[5] BlackRock : le plus gros gestionnaire d’actifs au monde. 7.000 milliards de dollars gérés soit 2,5 fois le PIB français et 34,2% du PIB de l’Union Européenne. Omniprésent dans les industries pétrolières.
[6] Discours de la servitude volontaire, Etienne de La Boétie, 1576.
[7] Lien porter plainte contre les organisateurs de l’évasion fiscale.