De quoi Macron est-il le nom ? L’An 01 du Parti unique -2

Le stand Décroissance...

Deuxième et dernière partie.

Suite de l’article paru hier qui montre comment le nouveau gourou du capitalisme décomplexé a mené sa campagne présidentielle ; comment il prépare habillement la campagne des législatives. Comment il voudrait agir après l’appel de son 18 juin.

Dans le sillon sanglant de la 5e République

Durant la campagne présidentielle, la candidate FN a eu le monopole de la dénonciation de Macron comme l’homme de main de la « mondialisation » et de la casse sociale en France. Machiavélisme médiatique, ces attaques -justifiées- sortant de bouche de l’héritière d’un parti fasciste ont eu plutôt tendance à la décrédibiliser et à valoriser son concurrent. Mais au-delà des joutes oratoires des deux personnages, le grand perdant de cette confrontation reste l’environnement, l’une des grandes victimes -lui aussi- de la « mondialisation ».

Actualité oblige, il faut aussi dire un mot sur un point d’unité nationale néolibérale Marine-Macron : la « Françafrique »

Casse social, loi Travail et état d’urgence : même combat

Le programme d’E. Macron « est la destruction de la sécurité sociale, du code du travail jusqu’au bout, des retraites, parce que son programme est l’ubérisation de la société, le maintien de la 5ème république pourrissante », dit Jacques Cotta 1.

Logique avec lui-même, notre jeune énarque encensé par les médias et devenue le « Young Leader » d’un parti unique n’a pas caché qu’il gouvernerait par oukase. Comme dans les despotismes d’Asie centrale issus de la dislocation de l’URSS, il faudra bien ça pour imposer la loi « travaille (et tais-toi) ! »

L’état d’urgence veillera au grain. L’élu n’a pas encore eu l’occasion de s’exprimer clairement dans ce domaine. Mais il va sûrement aller dans le sens de l’un de ses mentors en politique, Jacques Attali, qui déclarait : «Aucun gouvernement n’osera plus aujourd’hui revenir sur l’état d’urgence »2. On le verra bientôt ; la loi du 19 décembre 2016 sur l’état d’urgence prend fin le 15 juillet de cette année … ou plus tôt si la France insoumise est laminée par la vague néolibérale Marine-Macron. L’Hexagone sera alors en situation de parti unique, pensée unique, sans opposition.

Françafrique, la machine à sous du système

Avec Macron c’est la fin du refrain obligé d’intronisation présidentiel : « en finir avec la Françafrique ». Il est significatif que le premier voyage présidentiel en dehors de l’Europe ait été au Mali ; pour rassurer ses amis présidents élus à vie et montrer la continuité de la politique africaine dans le pré-carré de la France.

Avec l’aspirateur à richesses de l’aide au développement, l’Afrique est accablée depuis des décennies par une dette illégitime et odieuse intarissable. Et derrière ce dispositif se dissimulent les crimes de l’économie de pillage : déforestation, extraction minière (uranium, coltan, fer, or …) et pétrole. Toute une structure mafieuse s’est mise en place pour tuer, dépouiller les paysans de leurs terres et exploiter les enfants et les adultes dans des conditions parfois proches de l’esclavage.

Ce dossier est suivi par l’Association Survie sur son site «  survie-ensemble contre la Françafrique »3 ; du point de vue de la critique de l’extractivisme on peut lire le paragraphe « La France à la mine en Afrique » dans l’article déjà cité dans la première partie 4.

C’est un sujet grave, notamment dans le domaine social et environnemental.

E. Macron n’a pas donné non plu son opinion sur l’actuelle politique étrangère étrangement guerrière de l’équipe sortante. Il doit considérer que ces sujets de politique étrangère restent du domaine réservé.

Contorsions écologiques pré-législatives

Il n’en a pas été beaucoup question non plus pendant la campagne électorale. Il est d’ailleurs frappant de constater qu’aucun mot n’a été prononcé sur l’écologie durant le débat d’entre-deux tours.

Le sujet étant très vaste, seuls quelques axes mentionnés dans le programme seront traités ici.

Contraintes électorales obligent, E. Macron s’est déclaré opposé à l’exploitation du gaz de schiste. Mais dans le même temps, il est favorable au CETA (accord entre le Canada et l’Union Européenne). Ce qui signifie que, lorsque ce traité sera ratifié, il permettra, sans contestation possible, l’exploitation du gaz de schiste… en France. Donc, deux positions macroniennes difficilement conciliables … sauf à penser que la deuxième l’emportera sur la première.

Le Macron ministre est très favorable à l’exploitation du gaz de couche en Lorraine -donc en Nord/Pas-de-Calais ! C’est ce que nous apprend le Président de l’entreprise concernée par l’exploration puis l’exploitation du gaz de couche : « Le 24 mai 2016, » …, E. Macron «  intervenait au colloque Cyclope des matières premières pour défendre l’exploitation du gaz de charbon : « Je suis favorable à la poursuite de l’exploitation du gaz de houille en Lorraine, dont les réserves sont prometteuses et qui est bien accepté localement. » L’ancien ministre poursuivait en précisant : « Les gisements de gaz de houille en France sont exploitables sans fracturation hydraulique, dans un territoire au passé minier favorable. C’est une opportunité industrielle à saisir. » En toute logique s’il est favorable à la fracturation hydraulique pour les gaz de couche, il faut s’attendre à ce qu’il le soit aussi pour les gaz de roche mère. Il a pourtant promis : pas de nouveau permis d’exploration ou d’exploitation de gisements d’hydrocarbures mais aussi de gaz de schiste sous son quinquennat ! Mais il y en a déjà tellement en cours qu’il semble difficile d’en rajouter. Au dernier décompte disponible en 2016, il y avait 62 permis accordés (PERH) et 130 demandes en cours ! Le problème est que la transparence n’est pas à l’ordre du jour puisque, actuellement, le site du ministère n’est plus accessible sur ce sujet !

Secret de Polichinelle, E. Macron est pro-nucléaire : ses atomes crochus avec l’atome sont « ni-ni » inscrits dans le sillon atavique de la 5e République. « Nous croyons au nucléaire, non pas parce que c’est un héritage du passé mais parce qu’il est au cœur de notre politique industrielle, climatique et énergétique (…) Le nucléaire, c’est le rêve prométhéen ». Trop jeune pour connaître Tchernobyl, il n’a rien vu a Fukushima, peut-être s’est-il aperçu de la faillite d’Aréva…

Manifestement fossilisé dans le Plutonium national, le nouveau Président est aussi favorable à la construction ad vitam aeternam des EPR (à Flamanville et à Hinckley Point en Angleterre…). Sans originalité par rapport à ces prédécesseurs, Macron est donc aveugle à la « Radieuse Bérézina » du fleuron industriel national 5. Il a appris sa leçon par cœur, son discours sent la vieille France, la soupe réchauffée de Valéry Giscard d’Estaing : une source d’énergie sans danger pour l’humanité  pour assurer indépendance énergétiquement nationale avec de l’uranium africain. Il est vrai que la Françafrique, c’est 100% du Made France.

On le sait Fessenheim, la plus vieille centrale nucléaire nationale, a atteint sa date de péremption. Notre rayonnant dirigeant s’enfonce dans le sillon de la déraison en récitant sa leçon : on fermera quand l’EPR de Flamanville démarrera. Ce qui correspond à ce que voulait déjà Hollande en fin de mandat ; et surtout cela signifie que bon Macron écopera et en assumera la responsabilité des malfaçons aujourd’hui connues de la cuve du réacteur. Il faut rappeler que l’EPR devait être fini en 2012 et coûter 2,8 milliards. En l’état actuel, les dépenses se montent déjà à 10 milliards et l’EPR doit être en fonctionnement au plus tard le 10 avril 2020 -sinon cela sortirait de la légalité ! Au cas où, hypothèse hautement envisageable, l’EPR ne serait pas mis en service, quel sera le scénario envisagé ?

Le néophyte qui ne connaît manifestement rien à l’écologie et au nucléaire veut récolter des voix chez les Verts. Pour cela il jongle avec les pourcentages et annonce vouloir faire baisser de moitié le nucléaire d’ici 2025, ce qui signifie la fermeture d’une vingtaine de réacteur. C’est techniquement possible. Encore faut-il commencer par démanteler le lobbys nucléaire : CEA, EDF, Areva, Andra… On touche là au dispositif civil de l’Etat profond au service du complexe militaro-industriel et de la dissuasion atomique française.

Quand il évoque la Guyane -une île d’après lui-, le nouveau Président est très favorable à l’exploitation d’une très vaste mine d’or en pleine forêt tropicale par une entreprise russe réputée maltraiter ses ouvriers.

Pour lutter contre la pollution de l’air -qui a augmenté en France- et les émissions de gaz à effet de serre, le locataire de l’Élysée va suivre la feuille de route de la loi de transition énergétique : sortie des énergies fossiles, fermeture des centrales au charbon. Ce ne sont que des intentions ! Par ailleurs, il n’est absolument pas fait mention des camions et des avions avec les conséquences dans les domaines de la pollution et du climat.

Les réponses de notre dirigeant concernant le projet d’aéroport à NDDL sont à géométrie variable … selon qu’il s’adresse aux élus de la région nantaise ou à des opposants à ce cadeau pour Vinci (WWF …).

Le jeune énarque veut favoriser la production de voitures électriques. Cela a une incidence chez Renault puisque cette entreprise va chercher en Afrique du coltan nécessaire pour les batteries. « Les voitures électriques ne sont probablement pas aussi « propres » que vous le pensez. Les clients doivent savoir que ces voitures vertes sont peut-être polluées par les souffrances des enfants qui travaillent en République Démocratique du Congo », affirme Amnesty International 6. Aucun problème de conscience pour le poupon Macron.

Il veut rénover 500 000 logements par an… sans dire comment il va faire.

L’artificialisation des sols n’a pas été évoquée directement… Sauf par un soutien d’E. Macron. Il s’agit de Corinne Lepage qui a affirmé sur France-Inter qu’il n’y aurait pas artificialisation des sols ! Comment cela se fera ? Promesse électorale -tenue également par le supporter du FN. Quadrature du cercle dans le contexte actuel quand on sait que les poids lourds du BTP sont les parrains de Macron ; Le vieux mot d’ordre de « La Croissance » n’est-il pas : « Quand le BTP va, tout va ! » En l’occurrence et de toute évidence : avec le Béton la croissance est plus le problème que la solution.

Pioché dans le bric-à-brac du programme Macron

Pour rappel, quelques points évoqués avant que le candidat ne devienne Président :

Fermer toutes les centrales à charbon au cours du quinquennat… Ce qui exclut de fait une sortie immédiate du nucléaire même en cas de catastrophe.

Élimination progressive des pesticides ; vieille promesse, la France est et reste la première fille de l’Église des pesticides en Europe.

50 % de produits bio, écologiques ou issus de circuits courts dans la restauration collective ; bonne nouvelle ! Il n’est jamais trop tard pour bien faire. Mais cela fait un quart de siècle qu’on en parle et l’on devrait déjà être à 100%.

Organiser une conférence mondiale sur la biodiversité ; ces conférences existent déjà depuis un demi-siècle avec une efficacité nulle. L’imposture de la COP 21 à Paris et des conférences environnementales ne laisse présager rien de bon sur l’évolution politique des élites concernant la 6e extinction des espèces.

Réformer la politique agricole commune (PAC) ; on ne compte plus les réformes dans ce domaine.

Organiser le Grenelle de l’alimentation ; pitié, plus de Grenelle, « ça commence à bien faire ».

Développer les voies pour les bus, VTC et le covoiturage ; cela fait 60 ans qu’on attend !

Privilégier la modernisation des réseaux de transport existants et les petites lignes ; cela signifierait remettre des autoroutes ? Par ailleurs, moderniser les petites lignes signifierait ne pas prioriser les grandes lignes ? Étonnant de la part des partisans de la ligne néolibérale !

Bref, tout ça est très vague, voire utopique pour cette nouvelle équipe, tant dans le contenu que dans les échéances. L’oligarchie « En Marche » n’a pas pu se dispenser de ce qui fait le charme médiatique des campagnes électorales. Les promesses n’engagent que ceux qui y croient ; il serait dommage de s’en priver …

Le Meilleur des Mondes Numérique

Un sujet très important dans la pensée algorithmique de la macroniquerie n’a pas été abordé. Le Meilleur des Mondes numérique, de la robotique et du transhumanisme est centrale dans la pensée unique de l’élu de l’oligarchie. Il fera l’objet d’un prochain article.

Une évidence « En Marche »

Gouvernement par ordonnance, état d’urgence en permanence, casse sociale par la loi « travaille et tais-toi », extractivisme exacerbé sur tout le territoire, saccage des paysages sans entrave, politique énergétique fossilisé jusqu’à l’asphyxie, gaz de schiste et de couche, nucléaire à perpétuité jusqu’à la catastrophe, Françafrique… On le voit, il n’a pas fallu attendre longtemps pour que le voile tombe. Surdoué, le « candidat antisystème » n’a eu aucune difficulté à se fondre dans sa fonction pour devenir l’homme à tout faire le plus dévoué du système. Les prémices du parti unique des affairistes étaient déjà en germe avec les alternances dans la continuité et les cohabitations… C’est désormais une exigence de l’oligarchie et une évidence « En Marche » avec celui qui a été intronisé Président.

Pierre Rose, membre des collectif Houille ouille-ouille 59/62 et Anti-THT 59/62

Jean-Marc Sérékian auteur de « Radieuse Bérézina » Ed. Golias 2015

Notes

1– citation de Jacques Cotta, auteur de « l’imposteur » paru en 2014 ;Ed. Balland

2https://www.publicsenat.fr/lcp/politique/jacques-attali-aucun-gouvernement-n-osera-plus-aujourd-hui-revenir-l-etat-d-urgence-13

3http://survie.org/

4- http://alternatives-projetsminiers.org/mine-responsable-un-nouvel-oxymore/

5- Jean Marc Sérékian « Radieuse Bérézina » Ed. Gollias ; 2015

6http://www.amnesty.be/IMG/pdf/afr_62_3183_2016_ext_fra.pdf

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