Il sera bientôt trop tard ?

L’humanité en danger.

Une intervention sur www.radioplus.fr  ; FM 104.6

Intervention que vous pouvez retrouver sur :

http://www.objecteursdecroissance62.fr/site/lib

Emission du Lundi 12 Mars 2018 « L’Air du Temps ».

Ils sont 15000 scientifiques de 184 pays à avoir tiré la sonnette d’alarme, en fin d’année dernière, sur l’état désastreux de notre planète, lançant ainsi un avertissement à l’humanité qui continue de saccager l’environnement. Il s’agit presque de la dernière mise en garde car si nous ne prenons pas les mesures adaptées, il sera bientôt trop tard !

« Trop tard », qu’est-ce-que cela sous-entend ?

Cela sous-entend que nous nous acheminons vers un réchauffement climatique qui ira bien au-delà des 2°C, c’est-à-dire au-delà desquels il y aura emballement climatique : libération du méthane emprisonné dans le permafrost, acidification accélérée des océans, pollution généralisée des sols, des nappes phréatiques, des cours d’eau à cause à la fois des intrants utilisés dans l’agriculture (pesticides…) déforestations (huile de palme…) mais aussi des montagnes de déchets qui s’accumulent au bout de la chaine de consommation (nucléaire, plastique, déchets miniers…). On pense qu’il ne faut rien changer dans notre mode de vie pour que les problèmes actuels soient résolus !

Depuis 1970, à cause des TIC –les Technologies de l’Information et de la Communication, qui seraient une réponse aux enjeux climatiques-, on pollue avec des déchets toxiques, électriques et électroniques, nucléaires, avec les BIG DATA CENTER de stockage de données ! Par exemple les 130 data centers français, principalement situés en région parisienne, absorbaient déjà en 2015 9% de l’électricité nationale.

En France, selon la SAFER, en 2017, 89 000 hectares de nature ont été saccagés, bétonnés … Dans de nombreuses régions de France, les sols deviennent stériles.

Dans l’usine Synutra de Carhaix, 800 000 litres de lait sont transformés chaque jour en poudre. Pour produire ce lait, il faut des paysans productivistes, peu soucieux de la nature. Pour transporter ce lait en Chine, il faut encore plus polluer.

Un autre exemple de la mondialisation : l’exportation subventionnée du poulet français, qui arrive sur les marchés de Cotonou –capitale économique du Bénin-, entraîne la mort des petits éleveurs de ce pays d’Afrique.

Par ailleurs, les énergies exploitées, souvent non renouvelables, occasionnent des désastres : forages propices aux tremblements de terre, pollutions, catastrophes nucléaires, centrales hydrauliques et barrages provoquant des inondations … sans compter toutes les conséquences sociales.

Ce modèle de développement caractérisé par une prédation maximale sur les ressources naturelles et financières a des conséquences, notamment sur les peuples les plus pauvres qui subissent toujours les guerres entretenues pour défendre les positions extractivistes et sur notre empreinte sur les terres agricoles (huile de palme, soja pour nos bétails…).

C’est l’escalade en termes d’impact sur la Terre ! L’écocide continue … au  nom du progrès !

On pourrait penser que cette situation a été dénoncée dès le premier sommet de Stockholm en 1972. En fait, la catastrophe a largement commencé depuis les deux premières décennies d’après-guerre et René Dumont, l’écologiste français certainement connu, l’avait déjà annoncé dès 1960 : les tendances s’affirmaient menaçantes pour l’aspect atmosphérique ; la concentration de CO2 augmentait rapidement et de façon préoccupante. C’était un peu avant le premier « choc pétrolier »…

L’état de la planète est alarmant ; c’est catastrophique pour les générations actuelles et futures qui vont payer la facture !

En l’état actuel des choses, il est peut-être trop tard pour faire marche arrière ! Il est peut-être déjà trop tard pour sauver l’humanité !

Ce n’est pas la première fois qu’un tel appel est lancé. Il y a 25 ans, un groupe américain de scientifiques indépendant avait rassemblé plus de 1700 signataires (dont bon nombre de Prix Nobel), pour une tribune appelant déjà à « un changement majeur de notre manière de gérer la Terre nécessaire, si nous voulons éviter une vaste catastrophe humaine« . Dans cet état d’esprit se sont formés des groupes d’objecteurs de croissance et vous allez nous expliquer ce que veut dire « Faire objection de croissance »

Objecter la croissance, c’est dénoncer ce système consumériste et donc productiviste qui appelle toujours plus de croissance, c’est-à-dire à consommer toujours plus (publicité, crédit) et toujours plus vite (obsolescence programmée, grands projets inutiles…).

Faire objection de croissance, c’est lutter contre une fausse « économie verte » et les « fausses solutions écologiques » qui ne font que « verdir » la croissance des néolibéraux !

C’est une révolution silencieuse qui avance à grand pas ! Il ne s’agit plus seulement de s’opposer à la croissance. Il faut que les sociétés développées décroissent.

Dans le même temps, il nous faut lutter contre la corruption des néolibéraux, les profits de rapaces de la finance, les multinationales qui se remplissent les poches de capitaux, puis les traders cotant les produits en bourse grâce aux outils informatiques !

Il nous faut refuser cette conception politique de croissance basée sur une société de consommation insatiable, où tout s’exécute sans gestion économe : c’est-à-dire avec des surcharges et des conditions inhumaines de travail, avec de la surproduction, la surabondance, la surexploitation, la surextractivisme, sans prise en compte de l’empreinte écologique, des dégâts sur la biodiversité et la structure de la planète, ni des émissions de gaz à effet de serre !

Il nous faut repenser la productivité de façon à restaurer la nature, à réparer les injustices sociales, les injustices Nord-Sud, à améliorer la qualité de vie, les conditions de travail, à lutter contre la pauvreté et l’esclavage dénoncés depuis des siècles.

Tout ceci pour que l’humanité retrouve un potentiel de sérénité, qui permettra, d’une part, un partage plus équitable entre les peuples et, d’autre part, un partage avec les générations futures dont nos gaspillages compromettent la survie dans des conditions acceptables.

Ces objecteurs de croissance lancent un appel à convergence qui s’adresse notamment à tous les écologistes antilibéraux, les altermondialistes, les antiproductivistes … Alors d’abord : « Appel à convergence », un terme bien rébarbatif qui mérite des explications et vous allez, bien sûr, essayer d’être le plus clair possible pour nos auditeurs afin que nous comprenions bien ce à quoi aspirent ces objecteurs de croissance

Il est possible de retrouver l’intégralité de cet appel à convergence sur le site « initiatives-décroissantes » :

http://initiatives-decroissantes.net/francais.htm

Cet appel  a pour objectif de créer une union des groupes de luttes en opposition à tous les projets inutiles et destructeurs de l’environnement naturel, humain et animal. Des groupes qui s’opposent à un monde toxique et aux lobbies quels qu’ils soient, et à la politique du « toujours plus »

Mais si nous en restons aux constats, rien ne changera puisque les médias mainstream, les politiques en place, les communications des multinationales… permettent à ce système de perdurer en ne laissant pas aux populations la possibilité de faire les choix réellement éclairés qui permettraient de sortir de ce système capitaliste prédateur, présenté par tous nos détracteurs comme la seule solution possible.

Nous entendons nous mobiliser pour présenter une autre voie possible, plus humaine et plus respectueuse de l’environnement, donc des autres peuples comme des générations à venir. Cela suppose que les populations se réapproprient réellement les décisions politiques sur les territoires qui les concernent ; d’où l’émergence de cet appel mais aussi des luttes contre les grands projets inutiles, nuisibles et imposés (NDDL, Bure, LGV …) ou contre la toute puissance nucléaire caractéristique de la politique française actuelle.

Pour sortir de ce modèle croissantiste, il est urgent d’imaginer un modèle de société où la production et les décisions politiques sont questionnées et relocalisées, un modèle où chaque personne a la possibilité de s’exprimer. C’est tout le sens de cet appel qui lance une piste pour un travail « en commun »

Je disais que cet appel à convergence s’adresse à tous les écologistes antilibéraux, les altermondialistes et les antiproductivistes … Alors, précisément, qui sont tous ces gens ?

Cet appel à convergence a été lancé par des biologistes, chercheurs, philosophes, économistes, sociologues, journalistes, députés, objecteurs de croissance …

Il y a aussi ces groupes de personnes qui alertent quant à la poursuite de la déforestation et l’augmentation du CO2, quant à la non préservation des sols, de l’eau et toutes les espèces vivantes, quant à la poursuite de la mise en œuvre du TAFTA et de la mondialisation, de l’exploitation des gaz de couche, du Linky, des lignes THT, du nucléaire, des transports polluants, des usines «  mille vaches »,  de la transformation des terres agricoles au profit des hypermarchés, du bétonnage des sols, du transhumanisme (chirurgie robotique et l’homme augmenté), de l’avènement d’une intelligence non humaine avec l’ingénierie robotique électronique et les nouvelles technologies,…

Il y a aussi des associations environnementales (les amis de la terre), altermondialistes (ATTAC, le RAC, le CADTM…) mais aussi des partis politiques (NPA, EELV …), des syndicats (SUD …) qui ont signé l’appel. Il est urgent de dépasser les clivages et de se remettre à travailler collectivement.

Nous faisons bien entendu partie d’un « système » et là, c’est presqu’une remise en cause totale de tout ce qui se pratique

C’est en effet une remise en cause totale non seulement de notre système économique libéral prédateur mais aussi de notre modèle de développement qui s’appuie sur un progrès techno-scientiste et sur la robotisation à outrance ; c’est une remise en cause de la chaîne infernale et dévastatrice du modèle néolibéral dominant qui impacte tout le monde des vivants. C’est une remise en cause de l’ère industrielle, de la logique de croissance économique actuelle et du PIB.

Les partisans du système actuel voudraient encore plus de progrès technique, celui-là même qui nous mène dans le mur. « On n’arrête pas le progrès », entend-on souvent ! Il est nécessaire de rappeler que ce progrès a pour objectif toujours plus de consommation donc toujours plus de profits … aux dépens de l’humain.

 Ne croyez-vous pas que ce projet soit tout à fait utopiste et que ces gens qui le préconisent puissent passer pour des doux dingues ?

Il faut d’abord remarquer que les conséquences sociales et environnementales de ce modèle actuel sont de plus en plus perceptibles : des conditions toujours plus dures pour les plus pauvres, des prédations qui engendrent guerres, migrations… et des dégâts toujours plus importants sur la planète.

L’autoritarisme actuel de notre société vise précisément à cacher cette prise de conscience en nous faisant passer au mieux pour des utopistes.

Nous passerons de moins en moins pour de doux dingues quand on arrivera à faire voir le vrai visage de ce projet libéral et l’issue fatale de cette idéologie.

Il existe déjà une convergence d’alternatives riches, vers une nouvelle vision sociétale !  Les gens qui y participent ne revendiquent pas tous une appartenance à un groupe politique ! C’est une évolution depuis 2010, qu’il faut accompagner et aider !

Déjà 34 % des  15- 30 ans « mettent en avant un changement de mode de vie » pour répondre aux enjeux climatiques.  C’est très prometteur et d’autant plus intéressant que cela laisse le champ libre à toutes sortes d’initiatives innovantes porteuses d’un projet à vision autogestionnaire.

Cet appel à la convergence a été initié par des objectrices-objecteurs de croissance qui disent pouvoir proposer une série d’actions dans les mois à venir … Auriez-vous un exemple d’actions qui seront menées ?

Beaucoup de solutions locales fleurissent actuellement et prouvent que l’on peut faire sans continuer d’épuiser abusivement ressources et énergies.

Sont apparus des donneries un peu partout, des gratiférias, des vide-greniers de biens gratuits sans troc, des sites de troc et de dons où rien ne se vend, des SEL (Systèmes d’échanges locaux), des Repair’ Café avec contribution à la réparation –dans la région douaisienne, celui de Cuincy fonctionne déjà bien ; celui de Leforest essaie de se mettre en place.

L’agro-écologie, les circuits courts, des mises en commun locales, une gestion économe et écologique des sols, la permaculture  … font leur grand retour et participent déjà à une restauration de la terre.

Il commence à y avoir des groupes de réflexion et d’actions pour remettre en cause tout ce monde de plus en plus informatisé.

En Suède des centres commerciaux commencent à accueillir dans leurs rayons des produits recyclés pour améliorer le tri au niveau local !

Dernier exemple pour le moment : à Bilbao, en Espagne, s’est tenue fin octobre  2017  une rencontre internationale de l’écologie sociale. La convergence des luttes que nous venons d’évoquer va dans le sens de cette rencontre internationale.