Centenaire de la Guerre de 14-18 (suite)

et les femmes dans tout ça ?

Quel lien entre les femmes qui ont assuré la relève aux champs, dans les usines, les services, les hôpitaux et leurs petites filles aujourd’hui ? L’inégalité salariale ! Cent ans après, les femmes travaillent encore pour des prunes les deux derniers mois de l’année.

Vous le lirez, le Conseil des ministres décentralisé à Charleville-Mézières dans les Ardennes, qui s’est tenu le 7 novembre 2018 rend hommage « aux femmes mobilisées aux champs et dans les usines »

Ce n’est que justice car sans les femmes, les hommes, qui pleuvent sous les hommages aujourd’hui après avoir reçu un orage d’acier hier, n’auraient été approvisionnés ni en munitions ni en nourriture, vin et lettres (essentielles pour le moral). Sans oublier les infirmières.

Cet hommage rendu aux femmes qui ont assuré les arrières et les soins ne doit pas faire oublier (les commémorations sont aussi faites pour cela) que plus de cent ans après, elles n’ont toujours pas l’égalité salariale qu’elles réclamaient alors.

 

Côté usines

Ainsi, au lendemain de la mobilisation générale, le 2 août 1914, les femmes, suite à l’Appel_aux_Femmes de René Viviani, président du Conseil (1er ministre d’alors) et au nom de l’Union sacrée, remplacent les hommes mobilisés dans les champs et les usines notamment d’armement.

Et au nom de cette « Union sacrée », pas question de les payer comme les hommes à travail égal. Ce n’est qu’en juin 1917, après une série de grèves, que les 420 000 « munitionnettes » obtiennent des conventions collectives et un salaire minimum identique à celui des hommes.

Dans les faits, les industriels détournent les accords en refusant de professionnaliser les femmes ou en leur prélevant sur leurs salaires une contribution « bidon » dite pour la formation de la main d’œuvre féminine. Formation qu’elles ne pourront évidemment jamais faire.

Cent ans après c’est la même rengaine : l’égalité salariale est bien codifiée dans le code du travail article L3221-2

Or selon le site-d’action-pour-l-égalite-professionnelle de la CGT : 0,2% seulement des 60% des entreprises qui ne respectent pas cette loi ont été sanctionnées ! Et encore, le montant de cette pénalité est fixé au maximum à 1 % des rémunérations et gains versés aux travailleurs salariés ou assimilés au cours des périodes au titre desquelles l’entreprise ne sera pas couverte par l’accord ou le plan d’action. Drôle de dissuasion !

Conséquence : comme il y a cent ans, depuis le 6 novembre 2018 les femmes travaillent encore pour des prunes Notre article discriminations-plus-que-150-ans-pour-l-egalite-des-salaires

Les archives photos et videos  sur le travail des femmes pendant la Guerre de 14 sont plutôt rares et souvent édulcorées. On peut en avoir une idée sur le site de l’ECPAD (Etablissement de Communication et de Production Audiovisuelle de la Défense) en cliquant sur http://archives.ecpad.fr/la-femme-francaise-pendant-la-guerre ou en visionnant cette vidéo tournée dans une usine d’armement de Courbevoie en 1916 

Plus rares encore sont celles qui témoignent de l’action des femmes contre la Guerre, la première étant l’Appel à la Paix du 8 mars 1915 des femmes surexploitées lancé par l’Allemande, Clara Zetkin et repris en France par Louise Saumoneau une ouvrière de la confection : « Où sont vos maris ? Où sont vos fils ? Assez de meurtres ! A bas le capitalisme ! A bas la guerre ! »

 

Côté campagne

3 200 000 paysannes et ouvrières agricoles répondent à l’Appel_aux_Femmes du 1er ministre d’alors pour assurer la relève, c’est-à-dire des travaux jusque là « réserver » aux hommes : moisson, labour, semis, vendanges et taille, vente des produits sur les marchés etc.

C’est d’autant plus difficile que chevaux, mulets, bœufs sont réquisitionnés – Notre article sur la réquisition des animaux

On peut avoir une idée de ce travail, non reconnu au nom de l’Union sacrée, dans le film Les Gardiennes sorti dans les salles de cinéma il y a un an

Il faudra attendre l’arrivée de prisonniers allemands mais surtout la création d’une sorte de service militaire de la main d’œuvre agricole par Circulaire du ministre de la Guerre du 12 janvier 1917 pour que les paysannes (pas toutes loin de là) soient aidées par des hommes.

Nos mères et nos grands-mères se sont mobilisées en 14-18 pour assurer la relève dans les champs, les usines, les administrations, les services, les hôpitaux mais aussi pour que leurs filles et petites filles bénéficient de l’égalité salariale. Un bel hommage que ne leur a pas rendu le Président de la République dans son discours-de-cloture-du-Centenaire-de-l-Armistice

En lien :

– femmes en1914-1918

– la-longue-guerre-des-campagnes-vue-par-ernest-perochon

– Les Femmes et la Grande guerre Ministère de l’Education

– http://femmes1914-1918.blogspot.fr/

– A lire : Une-soupe-aux-herbes-sauvages/Emilie Carles

https://www.humanite.fr/centenaire-de-la-guerre-de-14-18-et-les-femmes-dans-tout-ca-663391