Ukraine convoitée et déchirée

Publié le 3 février 2023 sur Kairospresse.be

Il est utile de puiser dans le passé pour comprendre le présent. Ce texte, publié en juillet 2014, que l’auteur, Jean-Marie Chauvier, nous permet de reproduire ici, est adressé à ceux, comme il le dit lui-même « qui partageraient le désir de comprendre l’Ukraine », pays à peine connu ici avant 2022, « découverts aujourd’hui dans l’ignorance de sa complexité, nos médias s’étant d’emblée [à l’époque] mobilisés en faveur du coup d’état mené par une fraction de l’Ukraine et ses mentors occidentaux ». Cet article « évoque sa [ma] découverte de l’Ukraine, en des temps où une guerre était déjà envisagée (par la CIA) mais impensable (pour les Ukrainiens) et décrit ensuite les situations des diverses régions à la veille de la guerre du « Donbass » (…) alors qu’elle va meurtrir la région pendant huit années. Elle sera le prélude à l’invasion russe du 24 février 2022 et à la confrontation Russie-OTAN dont l’Ukraine est le terrain d’expérimentation, en attendant le pire…ou la désescalade, qui sait ? » Il est impossible aujourd’hui dans les médias du pouvoir d’exprimer un doute sur la légitimité d’une guerre qui, peut-on le dire, était « parfaitement évitable ».

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J’ai découvert l’Ukraine une première fois en 1966. Les charmes de Kiev, Odessa, de la Crimée m’ont convaincu, et aussi quelques visites bien arrosées dans les kolkhozes. Des impressions très favorables, mais aussi très superficielles. Les chromos de la propagande soviétique me convenaient encore.

Il m’a fallu y séjourner à nouveau en 1991–1992, au temps de la dislocation de l’URSS, pour percevoir l’existence d’une question nationale sérieuse et aussi, la diversité de ce pays. A l’ancien fantasme du peuple soviétique indivisible ne s’opposait pas pour autant le nouveau cliché du pays en rébellion, mû par un mouvement national ou indépendantiste univoque. C’était bien plus compliqué !

À l’Ouest, en Galicie anciennement polonaise, je vois une région agitée par les questions nationales, ethniques, linguistiques, religieuses et majoritairement favorable à la sortie de l’Union soviétique. J’y découvre un rassemblement des vétérans de l’armée des partisans de Stepan Bandera. Je verrai également en vente, ici et à Kiev, autre surprise, des brochures nazies et antisémites. L’URSS n’avait pas encore rendu l’âme, ils étaient déjà de retour ! J’apprendrai plus tard que ces anciens bandéristes, de retour vers le milieu des années cinquante du Goulag où ils avaient été enfermés quelques années auparavant, avaient passé le flambeau de la cause aux nouveaux dissidents, rejoints après 1991 par les rescapés de la Diaspora canadienne, anciens de la collaboration nazie et de la Waffen SS Galitchina.

À l’Ouest toujours, plus au Sud, en Transcarpatie, image inversée, une région largement indifférente au nationalisme, je note la bonne entente, parmi les personnes rencontrées, entre Ukrainiens, Hongrois et Russes, il y a bien une petite guerre des églises mobilisant quelques centaines de personnes. Il y a la surprise amusée des étudiants d’Oujgorod lorsque j’évoque le rapport de la CIA qui, à l’époque, publié dans le Spiegel allemand, prédisait une guerre entre l’Ukraine et la Russie. C’était tout simplement inimaginable. Mais tout de même, l’idée germait déjà à la CIA !

Au Sud, à Odessa, l’ambiance n’est pas moins paisible et attentiste. C’est étrange. On dira de cette période que c’est un effondrement, une catastrophe géopolitique ou encore, s’agissant de l’Ukraine, un grand soulèvement national. Il n’y a rien de tel, à vue d’œil. La vie quotidienne est presque normale, n’étaient les pénuries croissantes. Les gens sont perplexes, incrédules. C’est au voyageur étranger qu’on pose la question : « Vous croyez vraiment que l’Union soviétique va disparaître ? ». Ma réponse indécise amène cette autre réflexion : « De toute façon, cela se décide en haut, nous n’avons rien à dire ». Passivité, résignation.

Au centre, à Kiev, la capitale, l’ agitation politique est bien là, dominée non par les passions nationalistes, mais par le souci des élites soviétiques locales de se construire un nouvel état. Un gouvernement, une armée, une administration, des ambassades, beaucoup de nouveaux fromages, sans compter les usines à privatiser. J’y rencontre un conseiller économique du gouvernement dont les coordonnées m’avaient été données par un ami de gauche à Paris. Le conseiller m’expliqua qu’il travaillait pour la fondation Soros. Les employés de ce financier et expert en réformes, j’en avais déjà vu à Moscou, et j’en reverrai plus d’une fois en Ukraine. J’ignorais encore tout du fameux « soft power » US.

À l’Est, dans le bassin industriel du Donbass, s’imposent de tout autres préoccupations, économiques et sociales, la peur du chômage et des conséquences d’une désagrégation de l’Union. Il faut savoir qu’outre le charbon et l’acier, l’Ukraine fournit des segments essentiels de la production d’armements, d’industries aéronautiques et spatiales soviétiques et de nos jours, russes et kazakhes. Les mineurs du Donbass ne me parlent pas de langue ou de nation, ils viennent « de tous les coins de l’Union » et s’inquiètent surtout des ruptures de livraisons du bois de mine. Ils se souviennent avec émotion des grandes grèves de 1989, quand ils exigeaient encore des hausses de salaires et de meilleures conditions de travail. De ce « meilleur avenir » il n’est plus guère question – chacun se demande maintenant jusqu’où ira la dégradation du pays. On évoque les fermetures possibles, les émeutes de la faim qui pourraient soulever le Donbass. La colère s’exprime envers « le parti communiste », mais il n’est pas question de souhaiter la rupture avec les autres républiques soviétiques, ni l’érection de « nouvelles frontières ».

Au référendum du 17 mars 1991, l’écrasante majorité des gens de l’Est et du Sud s’étaient prononcés pour le projet Gorbatchev d’Union réformée – les votes de l’Ouest allaient en sens contraire. L’indépendance plébiscitée partout en fin d’année, après les changements de pouvoir à Moscou, revêt des sens différents d’une région voire d’une personne à l’autre : c’est une époque d’espoirs et de désarroi.

Vingt ans ont passé et n’ont pas démenti cette diversité, cette fracture Est-Ouest qui se vérifie en amont dans l’histoire et dans les différences sociales (ruralité à l’ouest, villes industrielles à l’Est) en aval lors des élections législatives et présidentielles et en ce moment même, dans l’opposition entre le pouvoir issu de l’insurrection de Maïdan et les populations du Sud-Est adeptes, soit d’une autonomie accrue, soit du fédéralisme, soit, pour une minorité d’entre elles, du séparatisme ou du rattachisme à la Russie. L’élection du président Porochenko le 25 mai 2014 n’a pas démenti cette fracture. Même si, unique candidat réellement présidentiable, et en l’absence de toute représentation politique de l’Est, Porochenko a également obtenu des suffrages dans les régions sud-orientales, d’électeurs qui, très probablement, en espéraient des initiatives apaisantes, permettant d’éviter une guerre civile.

De quoi « l’Ukraine » est-elle le nom ?

La première grande question posée serait, pour reprendre une formule bourdieusienne : de quoi l’Ukraine est-elle le nom ?

Les quinze nouveaux États nationaux issus des quinze républiques dites « d’Union » de l’ex-Union soviétique ont été confrontés à des crises identitaires, à savoir aux questions : qui sommes-nous ? dans quelles frontières et sur quels territoires ? dans quelles langues ? quelles religions et idéologies ? dans quels rapports avec les anciennes républiques, avec le monde extérieur, principalement le dit Occident dont les influences, les produits, les armées s’engagent dans nos territoires ou à nos frontières ?

Pour les peuples de Russie, il s’agit principalement de se définir en tant que nation au sein d’une fédération multiethnique et pluriconfessionnelle. La fédération « rossiiskaïa » au sens citoyen n’est pas l’état « rousskoie » au sens ethnique que souhaitent les ethnonationalistes, mais non les patriotes d’état ni les eurasistes.

Pour les Biélorussiens, la question est de se promouvoir en tant que nation dans un pays ethniquement homogène mais bilingue, avec dominante russe en milieu urbain.

Le pays souligne son identité dans une nouvelle (et ancienne) appellation : Belarus, et non plus Bielorussia, qui sonne trop russe.

Pour les citoyens de l’Ukraine, il s’agit de s’organiser dans un état unitaire alors qu’est évidente la diversité d’héritages historiques, de langues, de rapports au monde russe. En 1991, la volonté l’emporte, au niveau du pouvoir, de souder l’unité nationale, à commencer par la langue, l’ukraïnisation. Il n’y aura plus qu’une seule langue officielle, l’ukrainien, alors que la moitié du pays parle russe.

La Russie, le Belarus et l’Ukraine ont des origines communes que l’on peut situer dans la Rous’ de Kiev aux IXe-XIIe siècles. La Rous’ traduite par « Ruthénie » ou « Russie » (Rossia en latin). Des Russes peuvent considérer Kiev comme « la mère des villes russes », la Rous’ comme le berceau de toutes les Russies. Et des Ukrainiens de répliquer : « comment peut-on situer son berceau dans un pays étranger ? ». Le problème est qu’il n’y avait en ce temps là ni Ukraine – le mot n’existait pas – ni Russie au sens que ce mot revêtira plus tard. Il y avait la Rous’, et ses habitants les Roussiny. Il faudrait apprendre à ne pas attribuer à des pays anciens les noms de pays actuels qui en ont hérité certains traits mais dans une grande discontinuité historique.

Après la destruction de la Rous’ par les invasions tataro-mongoles, les parcours des anciens Roussiny ont été très différenciés. Grosso modo, les territoires occidentaux ont été successivement intégrés au Grand Duché de Lituanie, aux royaumes polonais, à l’Empire austro-hongrois (ainsi, la Galicie ruthène ou ukrainienne n’a jamais fait partie de la Russie). Les terres orientales ont été liées ou intégrés à la Russie, ce qui a impliqué les brassages avec les peuples turco-tatares, finno-ougriens, sibériens et autres assimilés par l’Empire. D’où les théories sur l’asianité de la Russie et l’européité de l’Ukraine et du Belarus, sujet de controverses inépuisables, nous pouvons au moins dire que nous sommes au croisement de plusieurs civilisations, dans des pays frontières, ce qui peut se traduire par « Ukraïna » (0’kraïna ).

Le territoire nommé « Ukraine » s’est constitué au cours de l’ère soviétique mais la partie occidentale n’a été intégrée à l’URSS qu’en 1939 et surtout après la fin de la guerre en 1945 et dans les conditions particulièrement dramatiques de la terreur stalinienne. Les répressions et les déportations qui ont frappé ces régions occidentales juste avant et immédiatement après la guerre ont certainement pesé dans l’hostilité, plus vive dans ces régions qu’ailleurs, envers le communisme, l’Union soviétique et les Russes. Elles expliquent l’accueil favorable fait aux troupes allemandes, dans ces mêmes régions, lors de l’invasion hitlérienne de juin 1941 et l’initiative populaire spontanée des premiers pogromes contre les Juifs, associés au NKVD, avant même que les Einsatzgruppen ne se chargent de la tuerie.

Galicie : aux sources du « nationalisme intégral »

La fracture Est-Ouest s’est vérifiée dans les engagements au cours de la seconde guerre mondiale. C’est principalement en Galicie ex-polonaise, berceau du nationalisme radical ukrainien en lutte contre le régime polonais, que se sont formées les armées et les structures de collaboration avec l’Allemagne nazie. Ce nationalisme dit « intégral », en rupture avec les traditions démocratiques et socialistes du mouvement national ukrainien, s’est concentré au sein de l’Organisation des Nationalistes Ukrainiens, OUN, formée en 1929, nourrie d’inspirations fascistes et nationale-socialiste. C’est d’elle que sont issues les structures de la collaboration et de la lutte armée contre les Soviétiques et les Polonais, : le Comité Central Ukrainien, les bataillons ukrainiens de la Wehrmacht, (Nachtigall et Roland) plusieurs bataillons punitifs de Schutzmannshaften spécialisés dans la répression des partisans en Biélorussie, la Division Galitchina (Galizien) de la Waffen SS, l’Armée insurrectionnelle (UPA) qui, impliquée dans le génocide des juifs, des tsiganes l’extermination des Polonais de Volhynie , s’est également rebellée contre l’occupant allemand, au nom des promesses indépendantistes que les Allemands n’ont pas tenues. Ces conflits avec les Allemands permettent de présenter les bandéristes aujourdhui, notamment dans certaine presse chez nous, y compris à gauche de la gauche, comme une résistance antiallemande voire antinazie ou, plus agréable à nos oreilles, « antitotalitaire ».

Une présentation qui implique de subtils camouflages, auxquels se prêtent bon nombre de nouveaux propagandistes, également d’auteurs et de journalistes occidentaux sympathisants de l’Ukraine « orange ». Ce type de réhabilitation des banderistes procède d’un quadruple camouflage, rencontré dans de nombreuses publications d’auteurs ukrainiens et français et dans des articles de presse récents :

Le premier consiste à ne jamais faire état de l’idéologie de l’OUN, reposant sur les canons de l’ethnicité, du peuple-race, qui rappelle l’idéologie nazie « völkish », du darwinisme social divisant les nations en nations-seigneurs et nations-esclaves, de l’ « Ukraine au dessus de tout » — en l’occurrence les théories de l’idéologue de l’OUN, Dmitro Dontsov, également traducteur en ukrainien de « Mein Kampf ». Cette idéologie est bien connue, bien présente sur les sites internet d’extrême-droite, mais n’est plus guère évoquée dans les grands médias et totalement ignorée en Europe occidentale. Aucun ouvrage français ne semble avoir été consacré au fascisme ukrainien.

Le deuxième camouflage évoque la « Légion ukrainienne » sans préciser qu’il s’agissait de bataillons de la Wehrmacht, de la Division Galitchina sans préciser qu’il s’agissait de Waffen SS, de l’Armée Insurrectionnelle UPA sans préciser qu’elle fut recrutée au sein de la Schutzmannshaft 201 que commandait Roman Choukhevitch après avoir commandé le bataillon Nachtigall et avant de diriger l’UPA. Les crimes de guerre de ces armées sont également dissimulés ou niés.

Le troisième déguisement évoque fièrement la proclamation de l’état ukrainien indépendant le 30 juin 1941, sans préciser que la déclaration jurait fidélité au IIIe Reich et à Adolf Hitler dans la lutte commune contre le bolchévisme. Il est exact que cet indépendantisme n’est pas approuvé à Berlin et que Bandera est interné à Sachsenhausen d’où les nazis vont le libérer en 1944. Dès lors, les frictions entre les nationalistes de l’OUN et leurs promoteurs allemands vont se multiplier faisant des victimes dans les rangs nationalistes. De là à en faire des « résistants au nazisme » il y a un pas que franchissent les réécritures de l’histoire sans difficultés pourvu qu’elles évitent de mentionner le contexte des frictions.

Enfin, last but not least, le quatrième camouflage concerne la participation des banderistes et des autres composantes de l’OUN aux expéditions punitives des polices nazies, aux pogromes, au judéocide et au génocide des tsiganes, et surtout, l’UPA agissant pour son propre compte, à l’extermination des populations civiles polonaises de Volhynie.

Je n’insisterais pas sur ces faits historiques s’ils n’étaient systématiquement occultés dans l’actuelle littérature révisionniste, y compris en France et… à gauche.

Or, cette histoire là, celle de la collaboration et des crimes de masse des banderistes, si elle est étudiée avec soin par des historiens, notamment allemands et ukrainiens, ne fait l’objet d’aucun examen de conscience en Ukraine où il est tellement question de « restaurer la mémoire ». Tout au plus y a‑t-il eu une reconnaissance de « l’holocauste juif » et des hommages à Baby Yar, sous le patronage des autorités israéliennes, qui prennent soin de ne pas rappeler le rôle des fascistes ukrainiens dans le judéocide, ce qui porterait atteinte aux bonnes relations et à « l’alliance stratégique » entre Israël et l’Ukraine.

C’est précisément ce révisionnisme militant qui, depuis vingt ans, a changé, dans les régions de l’Ouest, l’image de bandits fascistes qui collait à la réputation des banderistes sous le régime soviétique en mythologie romantique des résistances patriotiques qui auraient combattu contre les trois occupants : soviétiques, allemands et polonais ou encore, dans une version plus adéquate à nos attentes occidentales, en récit épique d’une « résistance antinazie » dont personne n’avait jamais jusque récemment perçu l’existence.

Une autre façon de trafiquer l’histoire consiste à présenter l’Ukraine comme globalement ralliée à l’Allemagne, par réaction à la famine et autres répressions staliniennes qu’elle avait subie. C’est sans doute l’explication d’une partie des ralliements à l’envahisseur, d’autant qu’en Galicie, l’annexion soviétique de 1939 fut également perçue comme une invasion. La Galicie qui, polonaise dans les années trente, n’a cependant pas connu la famine, ni le régime soviétique.

C’est dans l’Ouest ex-polonais que la collaboration est la plus prononcée, et dans le Centre et l’Est soviétiques que la résistance antifasciste est la plus active.

Environ sept millions d’Ukrainiens auraient combattu au sein de l’Armée Rouge, environ 200.000 auraient fait partie des diverses armées et organisations allemandes sous l’occupation ou dans les organisations nationalistes autonomes. Cette différence d’engagements pèse lourdement dans l’actuelle « guerre des mémoires » dont nous avons vu les débordements pendant le Maïdan, avec la destruction d’une quarantaine de statues de Lénine et la profanation de monuments aux soldats tombés dans la lutte antinazie par les commandos nationalistes qui, par ailleurs, vénèrent les héros de la collaboration nazie et de la résistance à la soviétisation. La mémoire à l’Ouest est partiellement nationaliste, la mémoire à l’Est est massivement antifasciste.

Le 9 mai 2007, fête traditionnelle de la Victoire sur le fascisme, à Kiev, j’ai vu le Maïdan comme on ne l’a jamais vu sur nos télés : inondé de drapeaux rouges, décoré d’étoiles soviétiques, un défilé militaire officiel, présidé par le président Iouchtchenko, précédant une manifestation populaire de plusieurs dizaines de milliers de participants. En 2014, cette célébration est interdite en Galicie et convertie à Kiev, officiellement, en commémoration des victimes de la guerre, mais la célébration a toujours lieu dans les villes de l’Est, du Sud, de Crimée aux cris de « Le fascisme ne passera pas ».

Le rôle de l’extrême droite à Maïdan

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